L'Édito

Qu’est-il arrivé au management pour qu’il soit presque devenu un gros mot ?

Publié le vendredi 25 octobre 2024

Les hôpitaux, l’éducation, la justice, les services publics en général… rien ne va plus ! Ce n’est pourtant pas faute d’avoir appliqué depuis les années 1990 les supposées bonnes recettes du management privé à la gestion publique. Et si le management se porte mal dans le public, il ne se porte pas beaucoup mieux dans les entreprises, où le désengagement des collaborateurs est l’une des priorités des DRH et où la perte de sens est régulièrement évoquée.

Les entreprises elles-mêmes cherchent des dérivatifs au management sclérosant en tentant de « libérer les énergies » ou de revivifier la « culture entrepreneuriale », synonyme d’initiative. Qu’est-il arrivé au management pour qu’il soit presque devenu pour certains un gros mot ?

On aime dire que les Français sont nuls en économie, ce qui est discutable. Il est en revanche certain qu’on ne se comprend plus quand on parle de management, alors qu’il est désormais partout. Quel paradoxe !

En réalité, le management est très difficile à cerner, car c’est à la fois un art, une industrie et une science.

À l’école et sur le tas

Comme tout art, il s’agit d’une pratique qui s’est professionnalisée en mélangeant des techniques, des pratiques et de la créativité. Il s’enseigne à l’école, mais surtout sur le tas. Comme dans la restauration, on y trouve des apprentis, des chefs de brigade, des chefs plus ou moins haut de gamme, et des stars.

L’industrie est celle du consulting, qui a connu une croissance spectaculaire. Elle pratique des diagnostics, des comparaisons, la standardisation et l’industrialisation des pratiques. On y trouve des consultants juniors sortis des meilleures écoles, des seniors et des manageurs associés qui ont l’oreille des dirigeants d’entreprise.

La science, appelée d’abord science administrative, puis sciences commerciales, est devenue depuis plus de cinquante ans sciences de gestion et du management. Elle recouvre des disciplines nombreuses, comme la comptabilité, les théories de l’organisation, la stratégie, la gestion des ressources humaines, la finance, le marketing, la logistique, les systèmes d’information… Ses chercheurs produisent des connaissances à travers des entretiens, des études de cas, des analyses statistiques, sous forme de modèles, de descriptions… Étonnamment, quand les politiques ou les journalistes veulent un avis sur l’entreprise, ils persistent à interroger des économistes dont ce n’est pourtant pas le sujet d’étude. Cherchez l’erreur !

En réalité, ces différents types d’acteurs sont à la fois des spécialistes de la manière de s’organiser en vue d’une finalité, ce que les Anglo-Saxons nomment organizing, mais aussi des spécialistes des organisations, c’est-à-dire des entreprises, des associations, des services publics, etc. Ce double sens du mot organisation ne facilite pas la compréhension collective.

Commandement et leadership

Le philosophe Auguste Comte (1798-1857) séparait l’administration des choses et le gouvernement des hommes. Certains grands patrons se sont servis de cette distinction pour sélectionner leurs manageurs, entre ceux qui seraient « faits » pour être de bons chefs de choses, et ceux qui seraient « faits » pour être de bons chefs d’hommes. Les premiers étaient appelés à appliquer des méthodes rationnelles, à base de mathématiques, tandis que les seconds étaient attendus sur leur capacité à obtenir le meilleur des hommes qui leur étaient confiés – ce que la tradition militaire a toujours appelé commandement, et que l’on appelle aujourd’hui leadership.

Comment ne pas être perdu quand certains appellent tout cela management, tandis que d’autres réservent le terme au seul leadership, ou quand on confond pratique, industrialisation et rigueur scientifique ?

Le management a mangé le monde, et on peine toujours collectivement à savoir de quoi il s’agit. Pas étonnant alors que ce qui surnage du tumulte soit des jeux de posture et des controverses idéologiques peu productifs d’intérêt général. On dit s’interroger de plus en plus sur l’impact anthropologique de l’intelligence artificielle (IA), mais pas sur celui du management, dont les effets sont pourtant plus réels, plus anciens et plus massifs. D’ailleurs, comment pourra-t-on manager l’IA si on ne sait pas ce qu’est le management ? Il en va de même pour le climat. Comment manager une transition si on ne sait pas ce que cela signifie ? Car une transition, ça s’organise !

Ambition et continuité

Ne serait-il pas de la plus grande utilité publique pour la société de clarifier ce qu’est réellement le management, ses apports et ses limites ? Nous n’avons jamais eu autant besoin de savoir organiser l’action collective, quelle que soit la finalité recherchée. La transition écologique et la transformation technologique liée à l’IA sont probablement les plus grands défis organisationnels de l’histoire de l’humanité.

Qui peut aider à structurer et financer une telle œuvre d’utilité publique : repenser le management ?

Développer le dialogue entre les univers de la pratique, de l’industrie et de la recherche en matière de management serait une première action.

Encourager les réflexions sur la place de l’homme dans le management une deuxième.

Faire émerger de la somme de connaissances produites en sciences de gestion et du management quelques grands principes consensuels et les faire connaître du grand public et des décideurs, un troisième.

C’est un travail qui suppose de l’ambition et de la continuité, comme s’y était engagée en son temps la Fondation Ford, créée en 1936. Quelle fondation soucieuse d’accompagner un développement harmonieux de la société s’intéressera à cette urgente mission d’utilité publique ?
 

Christophe Deshayes
Chercheur en sciences de gestion et du management à l’Ecole de Paris du management

Tribune initialement publiée dans Le Monde du 12 octobre 2024.

Lancement de la chaire Phénix – Grandes entreprises d'avenir

Publié le vendredi 29 janvier 2021

Au fil de nos séances, depuis quelques années, nous étions de plus en plus intrigués par un phénomène qui semblait échapper aux radars des médias, de l’État, et même des marchés financiers : de grandes entreprises, qu’elles soient cotées en bourse ou non, renaissent tels des phénix, au moins dans certaines de leurs contrées. Les jeunes ne s’en rendent pas compte non plus. Ils pensent que l’avenir se résume au choix entre les start-up ou l’ennui, et que le choix des start-up est d’autant plus payant que s’ils se plantent, ce n’est pas grave puisqu’on valorise aujourd’hui ceux qui ont échoué dans un projet aventureux. 

Les grandes entreprises sont ainsi très dévalorisées par les marchés financiers, qui survalorisent de façon extravagante les entreprises issues du numérique. La capitalisation boursière moyenne de chacun des GAFA dépasse désormais celle du CAC 40, et l’écosystème des GAFA accumule de tels moyens qu’ils pourront bientôt acheter les “vieux” groupes pour faire de bonnes affaires en les dépeçant. 

Bien sûr, l’accent mis sur les start-up et la start-up nation a réveillé un monde un peu trop lové dans sa zone de confort. Il ne faut cependant pas exagérer la portée des start-up sur la vie sociale dans les périodes de turbulence qui s’annoncent. On aura certainement besoin de compter sur les moyens et la résilience des grandes entreprises ; du moins, celles qui savent réinventer leur avenir et celui de la société. 

Pour continuer à documenter ces transformations qui se concrétisent souvent par des innovations organisationnelles, méthodologiques et managériales, dégager leurs lignes directrices et communiquer largement ces résultats afin de changer la perception qui domine aujourd’hui, nous avons créé, en partenariat avec MINES ParisTech, la chaire Phénix – Grandes entreprises d’avenir. Vous trouverez sur son site les caractéristiques de ces grandes entreprises que l’on nomme les phénix et des exemples de transformations. Certains cas ont fait ou feront l’objet de séances de l’École de Paris (voir ci-dessous la liste des séances passées ou à venir) et d’autres viendront d’autres sources. 

En septembre 2019, l’École de Paris du management était accueillie dans les locaux de l’École des mines de Paris, ce qui devait bien sûr favoriser l’approfondissement de collaborations déjà anciennes, et nous remercions l’École de l’accueil fait à ce projet de chaire.

Michel Berry et Christophe Deshayes
Titulaires de la chaire Phénix – Grandes entreprises d’avenir

Le dernier kilomètre

Publié le mardi 17 novembre 2020

Il y a ce sentiment étrange que nous en avons mis sous le tapis, pendant des années, des siècles, et que
tout cela remonte aujourd’hui, à force d’accumulation, en déclenchant toutes sortes d’intolérances.
Sous le tapis, angles morts, laissés-pour-compte… Elles sont nombreuses, les expressions, à décrire
ces phénomènes de non-prise en compte, consciente ou non, de parties prenantes potentielles, ou d’effets
induits ou collatéraux.

L’économie a inventé la notion d’externalités pour reconnaître que ses cadres d’analyse laissaient de côté
un certain nombre de phénomènes. Depuis, la responsabilité sociale de l’entreprise, l’entreprise inclusive,
la décarbonation, la diversité, les stratégies dites Bas de la pyramide, l’égalité professionnelle entre les
femmes et les hommes, la lutte contre l’exclusion et les inégalités… se sont imposés comme des enjeux
d’autant plus importants qu’ils avaient été longtemps négligés. Car longtemps, le progrès a été comme
un train lancé à pleine vitesse, qui faisait peu de cas de ce qui l’entourait et laissait dans son sillage
beaucoup de laissés-pour-compte.

Tous ces trains manqués n’ont pas les mêmes explications. L’efficacité et le pragmatisme ont compté.
Le développement économique s’est longtemps opéré dans une approche industrielle, dans laquelle
le traitement singulier avait un coût marginal important. La notion de “dernier kilomètre”, bien connue
en logistique, traduit le fait que le coût de traitement s’accroît au fur et à mesure qu’on se rapproche
du point de livraison final, au fur et à mesure qu’on touche au singulier. Embarquer toutes les parties
prenantes nécessite un travail de fourmi.

Une autre explication à ces oublis s’impose malheureusement, celle des sacrifices que l’on fait au nom
de l’idée de progrès. Les grandes découvertes ont été conduites les cales remplies d’esclaves. Les promesses
de l’intelligence artificielle se font aujourd’hui en partie sur le dos de damnés du numérique, travailleurs
essentiels au perfectionnement de cette technologie, mais relégués aux oubliettes pour en préserver
le mythe.

Comment la finance peut-elle aider à sortir les gens de la pauvreté ? Quelle place et quel rôle pour
les soutiers du numérique ? Comment se traite la question des déchets, effet induit longtemps négligé du
progrès ? Comment les champions cachés, ces PME très performantes mais peu visibles, parviennent-ils
à recruter ? Comment, pour une entreprise, prendre le temps de s’intéresser aux start-up et d’intégrer
les technologies qu’elles développent ? Les articles de ce numéro traitent, selon des dimensions différentes,
de la capacité des entreprises à prendre en compte les angles morts.

Le dernier kilomètre, qu’il s’agit de parvenir à accomplir enfin, consiste à ne laisser plus rien ni personne
au bord de la voie. Un dernier kilomètre qui ne marque pas la fin d’un voyage pour le train du progrès,
mais l’entrée dans un cheminement apaisé et sans limite. Chi va sano va lontano.

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n° 146

Le temps de la distanciation

Publié le vendredi 3 juillet 2020

Se souvenir du Titanic ; Effondrement des certitudes ; De routine en chaos ; L’incertitude, ce tsunami Basculements merveilleux.

Ce ne sont pas là les titres de la presse quotidienne des semaines passées, mais ceux du Journal de l’École de Paris du management les mois qui ont précédé la crise de la Covid-19. Les relire après que la pandémie s’est invitée dans notre monde est troublant. Faut-il y voir une capacité ou une posture d’augure de l’École de Paris ? Ça serait contraire à l’humilité qui guide notre démarche. Tout juste pourrait-on concéder que notre approche capte des signaux faibles dans l’analyse des organisations.

Lorsqu’un virus venu d’Asie déboule comme un tsunami dans nos modes de vie, ce sont mille certitudes qui sont ébranlées. Des routines qui s’y étaient installées confortablement, parfois jusqu’à l’absurde, sont balayées, et c’est un système qui paraissait insubmersible qui semble pouvoir sombrer comme le Titanic, ou basculer dans un mode nouveau, pourquoi pas meilleur.

Nous ne sommes pas passifs, nous ne savons pas l’être, le confinement nous l’a rappelé. Nous, les êtres humains, avons besoin de construire notre monde et de nous organiser pour le faire. Nous participerons à écrire la suite de l’histoire, et ne nous la laisserons pas imposer par le virus. Mais comment agir quand notre référentiel – nos connaissances, nos certitudes, nos principes – s’est trouvé balayé ? Sur quoi se fonder ?

Ce numéro présente cinq textes qui n’ont pas vocation à dire l’avenir ni à apporter des solutions clés en main, mais qui, selon la tradition de l’École de Paris, donnent des clés de compréhension des phénomènes organisationnels et sociaux dans l’analyse de l’action.
 
Si une crise comme celle de la Covid-19 est inédite, les mécanismes à l’œuvre ne le sont pas. Le cyclone Katrina et sa gestion éclairent la situation actuelle et la difficulté structurelle des dirigeants à appréhender les crises ou la frontière qui se joue entre héroïsme et obéissance. La crise sanitaire a mis à bas bon nombre des règles auxquelles nous nous accrochons dans une illusion de maîtrise et un refus du non-déterminisme. Le deuxième texte interroge notre rapport aux règles, et son action stérilisante sur la créativité. La Covid-19 a mis en avant notre dépendance aux importations dans des secteurs stratégiques comme le médicament. En présentant l’histoire d’Axyntis, leader de la chimie fine, David Simonnet montre comment s’y sont imposées la diversification géographique et la relocalisation, et comment il aborde cette dernière avec ses clients de l’industrie pharmaceutique.

Une lumière a été jetée sur les EHPAD, dramatique. Ségolène Lebreton invite à mieux saisir la réalité de ces établissements, et, dans une projection qui peut paraître ironique, montre comment s’y traite l’articulation entre sécurité et liberté. Alors que la crise accroîtra les difficultés budgétaires des acteurs de l’audiovisuel public, qui ont pu jouer un rôle de phare dans la nuit du confinement, comment continueront-ils à assurer des missions appelées à se redéfinir ? En la matière, la BBC constitue une source d’inspiration.

Sitôt passée la sidération du confinement, l’espace médiatique a été envahi par mille donneurs de leçons et autant d’oracles, souvent des acteurs qui n’avaient jamais été privés ni de parole ni d’influence. Le virus nous a légué l’impératif de distanciation, avec lequel nous allons devoir vivre pendant un certain temps. La mise à mal de nos certitudes et de nos principes d’action suggère d’appliquer la même règle à notre analyse du monde à venir. Lorsque nombre de nos vérités s’effritent, la vérité du terrain, de l’action concrète, prend encore plus de valeur.

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n° 144

Un monde de flux

Publié le mercredi 20 mai 2020

La crise du Covid-19 a agi comme un agent de contraste, ces substances utilisées en imagerie médicale pour mettre en exergue des structures anatomiques. Le nouveau coronavirus a révélé les flux qui structurent le monde. Ou plutôt, il a révélé leur complexité à travers notre incapacité à endiguer rapidement sa propagation. Flux de personnes, de marchandises, d’objets quotidiens, contacts interindividuels… La quête des patients “zéro” et des chaînes de transmission comme l’évolution des recommandations sanitaires – les gestes barrières – traduisaient la recherche des voies de propagation du virus en même temps que la révélation pas à pas de l’écheveau complexe qui structure notre monde.

Le monde est fait de flux, à différentes échelles.

L’échelle mondiale, d’abord. Le commerce international tourne autour de voies d’échange, au premier rang desquelles les 55 000 bateaux qui sillonnent les mers du globe en permanence pour transporter 90 % de ce que nous consommons. Par les bateaux de compétition qu’il conçoit depuis trente-six ans, l’architecte naval Marc Van Peteghem a tout gagné. Sensibilisé aux enjeux environnementaux, il a réorienté ses compétences pour les mettre au service du virement de bord qu’il s’agit d’impulser à notre monde, en travaillant à la décarbonation du transport maritime.

Les systèmes de paiement sont les infrastructures de nos échanges. L’Afrique est en passe de se transformer par le développement d’un système de paiement par le téléphone mobile qui s’avère très adapté au contexte du continent. Si Orange Money disparaissait dans un pays comme le Mali, indique Marc Rennard, le pays s’immobiliserait.

Le déploiement du numérique s’est accompagné de la montée en puissance des plateformes, carrefours ou aiguilleurs des flux d’information. Elles opèrent dans le monde virtuel, mais impactent aussi le monde physique. Dans l’industrie, les plateformes se déploient et entraînent une révolution qui se traduit, chez Airbus, par des gains de productivité à deux chiffres, et chez GRTgaz, par une plus grande efficacité dans le transport énergétique, un autre élément constitutif des flux du monde.

Les mobilités des personnes évoluent radicalement, en même temps que les villes. Au cœur de ces mutations, l’industrie automobile est confrontée à un défi de taille, que certains acteurs, comme Renault et Valeo, ont pris à bras-le-corps. Ces transformations impliquent une réorganisation de nombreux flux : de l’énergie, avec la perspective d’utiliser les batteries comme solution de stockage pour les énergéticiens, jusqu’aux collaborations entre acteurs, sur l’innovation par exemple.
Au niveau territorial, La Poste s’est imposée comme un réseau de nœuds autour desquels s’orchestre un flux permanent, incarné par la figure du facteur. Alors que le courrier et la presse, vecteurs de cohésion sociale, perdent du terrain, elle cherche à se réinventer sur ce maillage territorial et se redécouvre un rôle essentiel dans les services à la personne.

Bateaux, informations, argent physique ou virtuel, individus sont engagés dans une farandole effrénée. Le ralentissement provoqué par le Covid-19 nous a fait basculer dans un régime nouveau, qui s’apparentait à une mise en arrêt du monde, à tel point surréaliste qu’elle a pu conduire le président de la République française, dans un même discours, à expliquer à ses concitoyens comment se laver les mains et à « interroger le modèle dans lequel s’est engagé notre monde depuis des décennies ». Interroger ce modèle est d’autant plus important qu’il l’est déjà dans les faits, par la transformation de fond qui touche son épine dorsale – les flux – dans ses différentes échelles. 


Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n° 143

 

L'autonomie, une révolution quantique ?

Publié le mardi 17 mars 2020

C’est une tendance actuelle, une tendance forte. Qu’elle soit spécifique à une génération – la génération Y – ou qu’elle soit un mouvement de fond lié au numérique et aux transformations qu’il amène, le besoin d’autonomie est une donnée à laquelle nombre d’entreprises s’efforcent de s’adapter. Il s’exprime sous des formes différentes. Certaines vivent l’autonomie au quotidien et doivent ajuster leur fonctionnement. Dans d’autres, elle est vue comme une aspiration profonde des employés, ou révèle des convictions philosophiques de leurs dirigeants. Pour les individus, elle est parfois le Graal qui guide une carrière.

Ainsi de Marie-Odile et Gilles Cabridain, qui ont franchi le pas et quitté des postes de responsabilité dans de grandes entreprises pour se lancer dans la rénovation d’appartements. Pour eux, il s’agissait d’une aspiration de longue date, dont l’expression mettait en avant les notions de projet, de passion, de réconciliation de l’économique et de l’humain, ainsi que celles de convictions et de vision en termes d’efficacité. Dix-huit ans après, leur choix d’autonomie leur aura donné raison.

Dans les grandes entreprises, l’autonomie se vit désormais au quotidien. Le turnover augmente, dans un mouvement qui paraît structurel, et elles doivent apprendre à vivre dans un contexte où le renouvellement des talents se fait continûment. Chez L’Oréal, c’est un million d’actes de candidatures qui sont traités chaque année dans le monde, pour recruter 14 000 collaborateurs en phase avec les valeurs de l’entreprise et aux profils diversifiés. Face à ce défi, l’intelligence artificielle est un recours intéressant pour les ressources humaines.

Arrivé par hasard à la tête de la société Sofraser, spécialisée dans différentes activités pour l’industrie, Luc Bellière a traduit ses convictions humanistes dans des expérimentations qui ont emmené petit à petit l’entreprise vers un modèle d’entreprise partagée, dans laquelle les activités commerciales et de maintenance ont été externalisées, autonomisées. Pour réussir de telles transformations de fond qui impliquent des processus longs, la première autonomie est celle de la pensée des dirigeants.

L’énergie de l’autonomie a été décisive pour le projet porté par le commandant des pompiers Malassigné. Ne pouvant se résoudre à constater que les tenues de pompiers sont enfouies en quantités une fois mises à la réforme, il obtient l’accord de sa hiérarchie pour, en marge de ses fonctions, leur imaginer une nouvelle vie, et mettre en œuvre un projet d’économie circulaire. Les propriétés de ces tenues en font un matériau isolant de très haute qualité, dont il a pu poser les bases d’une filière prometteuse.

La quête d’autonomie des milléniaux se traduit par une méfiance vis-à-vis des médias traditionnels et un rapport renouvelé à l’information et à la politique. La conséquence est terrible pour les médias historiques. Pour de nouveaux entrants, elle offre une opportunité pour répondre au besoin d’information de ces nouvelles générations. C’est le constat et le pari qui ont conduit à la création de Brut et au succès étourdissant d’un média qui affiche des chiffres vertigineux en à peine trois ans d’existence.

En donnant aux individus les moyens de revendiquer leur autonomie, le numérique a rendu visible l’infiniment petit du monde social – la société et les organisations – dans un mouvement qui peut rappeler la révolution de la physique quantique, et dont on peut s’attendre à des répercussions aussi importantes. Car avec l’autonomie comme avec la physique quantique, ce sont les relations entre les individus qui importent.

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n° 142

Se souvenir du Titanic

Publié le mardi 21 janvier 2020

Plus d’un siècle après, le souvenir du Titanic est vivace. D’autres paquebots, à l’histoire moins dramatique, nourrissent des mythes tout aussi durables : le Normandie, le Queen Mary, le France… La fascination, l’attachement que suscitent ces géants des mers tiennent beaucoup à leur dimension héroïque. Qu’on y songe : ce sont plusieurs dizaines de milliers de tonnes que l’on parvient à faire flotter et évoluer au large à des vitesses respectables. Si l’on maîtrise le principe physique sous-jacent depuis Archimède, les naufrages viennent régulièrement et dramatiquement nous rappeler qu’ils constituent des prouesses techniques. Et aussi des prouesses organisationnelles ! Le France a mobilisé plus d’un millier d’ouvriers pendant quatre ans : la mise à l’eau de ces paquebots est l’aboutissement de projets extraordinaires en matière de mobilisation et de coordination.

Pourtant, l’image du paquebot est négative dans le langage du management. Elle renvoie à de gigantesques organisations difficiles à bouger. Un paquebot, c’est la puissance… et le manque d’agilité.

L’histoire de Nokia peut rappeler celle du Titanic. Une réussite impressionnante, une taille insolente – jusqu’à 500 000 téléphones produits par jour, 40 % de part de marché mondiale – et un naufrage rapide, alors même que le PDG – le capitaine – avait tiré la sonnette d’alarme. Yves Doz propose une analyse de la partie héroïque de l’aventure et de son issue dramatique, laquelle, explique-t-il, repose sur des choix techniques – informatiques – déterminants et une difficulté croissante dans la coordination de l’ensemble des équipes. Nokia, dit-il, avait commencé à s’effondrer de l’intérieur avant même l’arrivée d’Apple.

La Chine est gigantesque. Comment ses dirigeants parviennent-ils à mettre en mouvement un tel paquebot ? Joël Ruet se livre à une tentative d’explication de l’incroyable mobilité chinoise, qui lui permet de s’afficher en pointe sur les technologies environnementales. Il met en avant une politique industrielle d’État qui organise une savante compétition dynamique pour faire émerger des oligopoles concurrentiels domestiques.

La Poste, c’est 250 000 postiers, 17 000 points de contact, un formidable outil industriel… et une baisse constante de l’activité courrier depuis dix ans. On a donc à la fois une extraordinaire puissance et une obligation de transformation. Un programme transversal d’unification de la prise en compte du client dans les différentes branches de l’entreprise montre que cette transformation est difficile, mais réalisable, le point le plus délicat n’étant pas la résistance des personnes, mais celle du système d’information. L’informatique…

L’informatique, la technique, talon d’Achille de la grande organisation ? Oui, la maîtrise de l’informatique est cruciale, explique Gérard Berry, et ni la France ni l’Europe n’ont pris la mesure de ses enjeux. En l’occurrence, le paquebot difficile à bouger, ce sont nos catégories mentales pour penser le numérique, qui nous empêchent de voir son hyperpuissance et les enjeux associés, et qui freinent le développement nécessaire d’une culture du numérique.

Le naufrage de Nokia a résulté de la dépendance à un choix technique, de problèmes de coordination, d’une culture peu propice à la collaboration à grande échelle et d’une certaine cacophonie. Quoi faire alors de l’autonomie en entreprise, notion qui suscite de plus en plus d’intérêt ? Le dernier article de ce numéro dresse un état des lieux de cette question en France, précise la notion, et laisse entrevoir que, loin d’être une source de cacophonie, elle peut être un facteur de compétitivité.

Le paquebot inauguré évoluera d’un seul tenant. Champagne ! Le périple ne fait pourtant que commencer, et cette unité de façade ne doit pas masquer qu’il vient d’embarquer d’autres enjeux de coordination, perpétuels.

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n° 141

Effondrement des certitudes

Publié le mardi 19 novembre 2019

C’est peut-être ce qui caractérise le mieux notre époque. Les certitudes s’effondrent. La période d’instabilité dans laquelle nous sommes plongés tient beaucoup au rythme effréné des innovations qui n’en finissent pas de transformer nos modes de vie, conséquences inépuisables du déploiement du numérique. Elle est aussi politique, sociétale, environnementale. Peu de piliers de nos sociétés sont épargnés par l’effritement général des certitudes sur lesquelles ils se déployaient. La défiance vis-à-vis des médias, la construction de monnaies “plus fiables” autour de la blockchain ou la mise à mal du modèle de la boutique physique au profit de la vente en ligne en sont trois exemples parlants : qui eût imaginé, il y a quelques années, que ces institutions centrales de nos sociétés pussent être ébranlées ?

L’effondrement de certitudes est un choc, il peut provoquer un réveil, celles-ci s’avérant a posteriori comme une source d’aveuglement. Jean-Paul Augereau en a fait la violente expérience. Dirigeant de trois entreprises, il sillonnait le monde et vivait à 100 à l’heure. Son réveil violent, consécutif à une grave septicémie contractée pour s’être lavé les dents à l’eau du robinet, l’a conduit à réinventer sa vie et à lui trouver un sens. Ce sera à travers un programme de don de fontaines pour apporter l’eau potable aux populations rurales en Afrique et en Asie. Effondrement des certitudes, recentrage sur l’essentiel, affirmation de convictions.

Le même recentrage semble opérer dans l’exemple de la presse, mis en lumière par le succès de The Conversation. La défiance croissante vis-à-vis des médias remet en lumière le puits de connaissances constitué par le monde académique. Un puits souvent négligé qui, en ces périodes de méfiance, se révèle être un précieux réservoir.

Les certitudes agissent comme un brouillard déployé sur une contrée, leur dissipation pouvant la faire apparaître sous un jour nouveau. Le sens de sa vie se révèle, de même que la richesse du monde académique ou encore l’absurdité de l’inexorabilité du chômage. Absurdité, car quand l’on veut bien regarder les choses, cohabitent, souvent sur un même territoire, des besoins et des ressources. Sur ce constat évident et pourtant négligé, une expérimentation conduite en Bretagne ouvre des voies intéressantes, en partant de ce que les personnes sans emploi savent et ont envie de faire.

Quelles certitudes avoir face à l’évolution du commerce et à l’engouement autour de la blockchain ? Laurent Frayssinet, directeur général de MEDIA6, et Thierry Rayna, professeur à l’École polytechnique, suggèrent respectivement deux réponses sages, le premier par l’expérimentation, la remise en cause de principes anciens et l’acceptation du brouillage des frontières entre commerce et communication d’un côté, entre physique et digital de l’autre ; le second par une prise de recul sur la réalité de la blockchain, ses atouts et ses faiblesses.

La seule certitude, disait Pline l’Ancien, c’est que rien n’est certain. Il est tout aussi certain qu’une société sans certitudes est difficilement imaginable tant elles constituent des repères collectifs. Réinventer nos certitudes et notre rapport aux certitudes est un des enjeux de notre époque.

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n° 140

In memoriam Roger Godino

Publié le jeudi 26 septembre 2019

Roger Godino est décédé le 18 septembre 2019. La presse a rappelé les multiples dimensions de cet homme qui sortait de l'ordinaire. Bâtisseur de l'imaginaire, avec les Arcs. Passionné de politique, où il a toujours joué un rôle actif. Passionné aussi de management, créateur de l'INSEAD et auteur de travaux remarqués sur la réforme de l'entreprise. Mécène des arts et notamment de musique. Humaniste qui s'est impliqué dans de multiples causes, comme en étant président d'Action contre la faim. Il était curieux de tout et d'un tempérament enthousiaste et généreux.

L'École de Paris du management lui doit une reconnaissance toute particulière. Il l'a accueillie fin 1993 dans ses locaux du 94, boulevard du Montparnasse, son PC opérationnel depuis des décennies. Intrigué par notre projet, il en a souvent discuté avec moi et m'a régulièrement challengé. Il est intervenu comme un des premiers orateurs de l'École de Paris sur sa démarche de création des Arcs, et ce fut pour nous une séance culte. Il nous a adoptés, soutenus, par les commodités qu'il nous a faites dans notre usage des locaux dont il possédait le bail, et financièrement par sa fondation. 

Il a veillé à ce que nous puissions rester dans ces mêmes locaux après son départ, la mode n'étant pas de louer à des associations, et a toujours maintenu son soutien.

Je l'ai rencontré régulièrement pour parler de nos projets et écouter des conseils, en appréciant sa curiosité bienveillante pour nos aventures. Nous en profitions pour discuter de ses projets pour l'entreprise, l'Europe, la France. Il n'arrêtait pas d'avoir des idées pour changer le monde.

Sans chercher à l'afficher, car c'était un homme discret, Roger Godino est un des fondateurs de l'École de Paris du management, et nous lui en sommes profondément reconnaissants.

Michel Berry

Ce cher et fragile bon sens

Publié le jeudi 19 septembre 2019

Comment a-t-on pu en arriver là ? Que n’a-t-on mis en avant plus tôt des solutions qui paraissent tellement évidentes après coup ? Les organisations ont une étonnante capacité à générer des aberrations qui s’installent dans leur quotidien et qu’on ne voit plus. Au Tricastin, fleuron du nucléaire français, la salle de crise persistait à être équipée de grands classeurs peu maniables quand tout aurait pu être numérisé. Et un grand hall industriel vide qui aurait divisé la facture par trois se faisait oublier quand il était question d’investir plusieurs dizaines de millions d’euros dans un nouveau bâtiment de traitement des déchets. Les organisations se sclérosent, créent des baronnies, des silos, et défient parfois le bon sens. Frédéric de Agostini mettra sept ans pour moderniser le site et en faire une organisation unifiée.

Le bon sens et la simplicité ont la vie dure. L’association ICDD promeut des solutions simples aux enjeux d’aujourd’hui. Il peut s’agir d’un procédé de dépollution des fumées industrielles et de récupération de leur chaleur qui s’est révélé à Jaouad Zemmouri… alors qu’il regardait la mer. Ou encore de créer
des arrêts d’autostop, idée d’Alain Jean pour relancer ce mode de déplacement en perte de vitesse. Leur simplicité contraste avec la difficulté à les faire admettre par la société qui produit, avec les organisations, une pensée dominante aveuglante et occultante.

Il y a longtemps qu’on sait que notre société et nos entreprises sont incapables de considérer le potentiel de milliers de jeunes, issus de cités, décrocheurs scolaires ou aux parcours atypiques. La création du Service civique en France a révélé ce réservoir considérable de talents ignorés dont le bon sens voulait
qu’on leur donne une chance. L’évidence du diagnostic n’a pu se concrétiser en un mouvement que conjugué avec une démarche militante et un travail de fourmi. L’action de l’Institut de l’Engagement passe par un accompagnement personnalisé. Les bonnes solutions viennent du terrain et s’articulent avec lui.
La démarche qui a permis à Bohin, dernier fabricant d’aiguilles et épingles en France, de sortir de l’ornière n’a pas découlé d’un plan stratégique énoncé puis déployé. Elle s’est faite par une présence sur le terrain, l’écoute des signaux, des décisions rapides. L’histoire de son redressement est jalonnée de moments
anecdotiques qui ont constitué autant de micro-choix structurants : inviter 1 000 boutiques américaines de patchwork sur un salon américain s’est ainsi révélé décisif. Une stratégie du bon sens au quotidien.

Le Laboratoire Science & Nature a été pionnier en faisant le constat de bon sens, dès 1972, que la nature constitue une réserve de ressources qui nous offre tous les ingrédients pour la cosmétique et l’entretien. Deux éléments frappent dans l’histoire de cette entreprise : une forme d’enracinement, dans la volonté de
compréhension intime de la nature et de notre lien avec elle, et l’affirmation permanente et sous-jacente d’une mission. Enracinement et mission, loin d’être contradictoires, sont peut-être indissociables.

Le bon sens est souvent paysan. Voilà bien une profession ou condition qui articule sens et mission avec un fort enracinement : compréhension et proximité du terrain, construction de liens, souci du détail, accompagnement personnalisé. Les ingrédients du bon sens…

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n° 139

Sur la ligne de crête

Publié le jeudi 4 juillet 2019

Montée en charge, passage à l’échelle, “scalabilité”… Le succès des entreprises repose moins sur la conception de solutions nouvelles que sur leur capacité à les déployer. Martingale génétique des entreprises industrielles, c’est aussi, parfois de manière plus critique, celle des entreprises de l’ère digitale, les start-up. Cette course à la taille structure la vie économique, celle des marchés et celle des organisations. En déployant des solutions de façon massive, elle laisse des interstices ouverts, lesquels permettent le développement de niches…

La grande échelle et la singularité ne font pas bon ménage. Leur conciliation apparaît pourtant comme l’un de nos plus grands défis. Il n’est qu’à considérer la question de l’emploi pour nous en convaincre, et cette contradiction dramatique, pour reprendre les mots d’André Dupon, de la cohabitation d’un important besoin d’emplois et de l’absence de réponses pour les laissés-pour-compte. Le traitement de l’insertion n’a pas échappé à la règle de l’approche industrielle, se montrant incapable de prendre en compte la multitude des singularités derrière la masse des laissés-pour-compte. Avec un chiffre d’affaires de 80 millions d’euros, Vitamine T relève ce défi de l’insertion à grande échelle, tout en conciliant aussi action sociale et initiative économique.

La prévention, dans la santé, soulève le même type de défi. Les approches de mass média ont toujours donné lieu à des échecs. Le groupe VYV a fait le pari de la révolution de la prévention. Dans son cas, le traitement de la singularité à grande échelle – VYV touche 10 millions de personnes – se fait dans la combinaison d’une solution numérique et d’une plateforme téléphonique. Des processus et de l’humain.

Même articulation fine entre des processus et de l’humain chez le fonds d’investissement Kima Ventures, lequel est capable de traiter trente projets par jour et de s’engager dans une centaine de start-up chaque année pour s’affirmer comme “le business angel le plus actif au monde”. Modèle industriel, certes, mais avec une équipe de seulement trois personnes. En s’appuyant sur des processus très précis, elle parie sur des interstices et la capacité d’équipes à réussir le passage à l’échelle, dans un modèle qui mêle efficacité et bienveillance.

Singularité et grande échelle, action sociale et initiative économique, efficacité et bienveillance… Les lignes de crête sont des voies difficiles à tenir, mais prometteuses dans leur capacité à relever les défis entrepreneuriaux ou sociaux. Pour Heliatek, l’enjeu est double. L’entreprise entend contribuer au grand défi environnemental en s’appuyant sur des films photovoltaïques moins contraignants et plus vertueux que les panneaux solaires. Sur le plan entrepreneurial, il s’agit de trouver une place dans les nombreux interstices laissés par les panneaux solaires. Sa ligne de crête consiste à concilier l’industrialisation et l’adaptation de sa solution à des contextes variés.

Le projet de Valeo en Chine implique aussi de marcher sur deux jambes : être mondial et faire partie de l’écosystème chinois. Un écosystème caractérisé par la vitesse affolante de transformations qui vont faire passer le pays du statut d’usine du monde à celui de laboratoire du monde et qui la remettront en son centre. Sa capacité à concilier industrie et conception, masse et créativité, étatisme et entrepreneuriat y seront pour beaucoup. De la force du yin et du yang pour maîtriser les lignes de crêtes…

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n° 138

Dépasser la finitude

Publié le vendredi 17 mai 2019

Avons-nous fait fausse route ? Sommes-nous allés trop loin ? À l’heure où l’idée de finitude se dresse en travers de notre route, nous avons tendance à regarder vers l’arrière, à examiner les deux siècles qui viennent de s’écouler, durant lesquels la civilisation a pris une direction nouvelle dont on constate aujourd’hui les excès. Saturation des grandes villes, surpêche et agriculture intensive, construction irraisonnée... ces excès concernent l’habitat, le travail, les déplacements, l’alimen­tation, soit nos modes de vie dans ce qu’ils ont de plus fondamental.

Ce regard rétrospectif sur la révolution industrielle met en avant la production de masse et l’hyper­spécialisation, et, au-delà, une raison technique, froide, sans humanité, arrogante car sûre de son fait. S’il est provoqué par l’enjeu colossal auquel notre civilisation fait face – son sauvetage, sinon celui de la planète –, ce regard l’est sans doute aussi par la nouvelle révolution, celle du numérique, qui substitue insidieusement au paradigme de la production de masse celui de l’individualisation.
Avons-nous fait fausse route ? Sommes-nous allés trop loin ? La réponse première à la crise environnementale impliquerait de faire marche arrière et de renoncer au paradigme intensif. La gageure est immense, tant ce modèle s’est inscrit dans notre existence quotidienne ; et cela interroge sur la possibilité d’une autre réponse. Peut-on continuer à produire en masse pour répondre à nos besoins vitaux en effaçant les excès induits ?

AMP Saumon de France et Isigny Sainte-Mère s’y essayent dans l’alimentation. La première a développé un modèle multi-sites, multi-espèces et multi-technologies pour apporter des réponses au besoin de production de protéines en quantité sans tomber dans les écueils de l’élevage intensif. La seconde, coopérative laitière normande, a pu afficher une croissance importante via l’export en assumant un respect de son terroir et de la rareté consubstantielle. Les acteurs de la mobilité y travaillent en envisageant des scénarios dans lesquels la mobilité actuelle pourrait être conservée en diminuant de 90 % la flotte de véhicules. L’agence PCA-Stream s’y emploie en nourrissant son activité de conception d’immeubles de bureaux de réflexions sur l’évolution du monde et les mutations profondes de l’entreprise, du travail et du management.

Ces différentes voies portent en elles l’idée de synthèse. Elle est consubstantielle au parcours et au travail de Philippe Chiambaretta, fondateur de PCA-Stream, qui voit l’architecture comme le lieu de convergence de différentes disciplines, et qui peut proposer de construire une tour haute en y introduisant de l’horizon­talité de fonctionnement. Synthèse peut signifier mariage de la carpe et du lapin ! Ou de la carpe et des légumes, le principe de l’aquaponie, l’une des solutions mobilisées par AMP Saumon de France, qui utilise les effluents de la pisciculture pour faire pousser fruits et légumes.

La nouveauté de ces approches est qu’elles concilient production quantitative et conscience de la finitude des ressources. AMP prend soin de ses saumons et reconnaît la préciosité des courants au large de Cherbourg ; les éleveurs normands savent combien le sol, le climat, les races des vaches et les savoir-faire sont leur richesse ; et PCA-Stream comprend que le lieu de travail devient un outil stratégique dans la guerre pour les talents que se livrent les entreprises à haute valeur ajoutée.

La synthèse implique aussi une articulation entre une production qui peut être éclatée – à Isigny Sainte-Mère ou dans les nouveaux modes de transport par exemple – et une gestion globale. L’enjeu de la régulation se pose dans l’évolution des modes de mobilité et dans les rôles que peuvent y jouer les différents acteurs. Alors qu’ils souffrent aujourd’hui de relégation, selon Jean-Luc Delpeuch, les territoires y ont un rôle considérable à jouer, parce qu’ils disposent de ressources démocratiques et humaines, et même économiques mal exploitées. La crise écologique et la crise démocratique se rejoignent dans un moment qui paraît charnière, dans la quête d’une synthèse du centre et de la périphérie, d’un modèle centralisé et d’un modèle émergent, de l’unité et de la diversité.

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n° 137

De routine en chaos

Publié le lundi 18 mars 2019

Le dérèglement d’un système social est un thème classique de la littérature et du cinéma. Un étranger arrive dans la ville, une erreur administrative se produit dans une bureaucratie extrême, une bouteille de Coca Cola tombe du ciel au milieu d’une tribu primitive coupée du monde… et un monde qui paraissait harmonieux entre dans un état de perturbation qui en menace l’équilibre, voire la survie.

Sont présentées ici des variations de ce thème dans des contextes d’organisations. Pour Total, l’élément perturbateur est l’inversion des cours du brut à partir de 2005. Dans l’histoire racontée par Laurent Pellegrin, il s’agit de l’arrivée en préfecture d’un cadre doté d’un goût pour le commandement éprouvé en compagnie de gendarmerie. Un robot de soudure fut introduit chez CFT Industrie, TPE spécialisée dans le cintrage et l’assemblage de fils, tubes et tôles. Le monde de l’agriculture est perturbé d’abord par une évolution des mentalités, des comportements, des attentes, ainsi que par des fluctuations de marché ; il l’est ensuite par l’introduction de nouvelles technologies pour répondre à ces enjeux. Dans le jeu vidéo, enfin, la perturbation est permanente, les technologies évoluant sans cesse.

Dans la littérature, l’élément perturbateur peut être perçu comme maléfique ou bénéfique, le système dans lequel il intervient se révélant en négatif comme réellement harmonieux ou au contraire totalement oppressant. Cette ambiguïté n’est sans doute pas pour rien dans la tendance insidieuse qu’ont les organi­sations à chercher la régularité, à se doter de routines... Il y a quelque chose de confortable à un monde réglé comme du papier à musique, sans fausse note possible, mais sans aucune possibilité de nouveauté, de surprise, d’écart, d’adaptation.

Dans la vie des organisations, le confort a une connotation négative. Il sous-entend assoupissement, parfois sclérose. Au début de l’histoire racontée par son PDG Patrick Pouyanné, Total vit confortablement et les règles et outils construits pour évoluer dans ce contexte coupent l’entreprise du réel. Le monde que découvre Laurent Pellegrin en arrivant dans la préfecture de Tulle « vit sur un mode assez consensuel et il ne se passe pas grand-chose ». La fonction publique, empire de la régularité, pose la question de sa mise en mouvement.

Sans licencier, Total est devenue la plus rentable des cinq majors pétrolières. Les services publics se sont mis en mouvement au passage de Laurent Pellegrin. Le robot de CFT Industrie a entraîné une trans­formation complète de l’entreprise, au point qu’elle pourrait revendiquer le qualificatif d’entreprise libérée. L’agriculture se réinvente, elle devient frugale et précise. Et Ubisoft continue à s’approprier les technologies disruptives pour enrichir ou faire évoluer ses propositions dans le divertissement.

Hors des règles, le chaos ! C’est en tirant parti de ce chaos que Patrick Pouyanné a relancé Total. Car les épisodes chaotiques de la vie des organisations peuvent permettre de remettre à plat leurs règles, de remobiliser les acteurs, les sortir d’un certain confort, leur permettre de redonner un sens, de retrouver curiosité et goût de l’apprentissage. De redonner vie.

À la fin de l’histoire, dans la littérature, l’étranger est parti ou s’est installé. L’erreur administrative a été réparée, ou ne l’a pas été. Le corps étranger a été éjecté, ou absorbé. Dans tous les cas, un nouvel équilibre s’est installé, un nouvel ordre social. Le calme est revenu, pour le meilleur… En attendant un prochain chaos peut-être salvateur.

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n°136

L'incertitude, ce tsunami

Publié le lundi 21 janvier 2019

Nous sommes entrés dans une ère de l’incertitude, un environnement dans lequel la prédiction est devenue extrêmement hasardeuse. Nul n’a pu anticiper les conséquences de l’avènement d’Internet, pas plus que celles du tsunami à l’origine de l’accident nucléaire de Fukushima. De cette conviction, découle, pour Philippe Silberzahn, enseignant et chercheur spécialisé dans l’entre­preneuriat, la conclusion qu’il nous faut revoir la manière dont nous prenons nos décisions pour nous adapter à ce nouveau paradigme.

Aux antipodes de Fukushima, en Normandie, une entreprise textile centenaire, Filt, a vu ses ventes japonaises chuter de 30 % après cet accident imprévisible. Si elle s’est relevée de ce choc brutal, c’est parce qu’elle a réagi très vite, en mobilisant équipes, fournisseurs et clients. C’est surtout parce que ses dirigeants avaient acquis d’un précédent dépôt de bilan la conscience de la fragilité de toute entreprise, à la merci d’un changement de réglementation dans un pays, d’une décision politique ou de l’augmentation du cours d’une matière première. À la merci de mille facteurs d’incertitude.

Un battement d’aile de papillon au Japon – ou un tsunami, qui est donc peu ou prou la même chose – a des répercussions sur un fabricant de filets à provisions en Normandie ! La globalisation est pour quelque chose dans ce déversement de l’incertitude.

L’environnement digital aussi, qui forge les réputations à grande vitesse, et plonge individus et marques dans un environnement volatil et peu maîtrisable. Pour y évoluer, celles-ci peuvent s’appuyer sur les stars des réseaux sociaux, parfois éphémères, qui génèrent des millions de vues et agrègent des millions de suiveurs. Dans un monde en manque de repères, Studio71 les aide à interagir avec ces nouveaux talents pour toucher les Millennials

L’environnement digital, ce sont aussi les attaques informatiques, notamment celles du type WannaCry, qui peuvent mettre une entreprise ou une économie à terre. Face à cette autre source d’incertitude aux conséquences potentiellement désastreuses, les entreprises tentent de s’adapter, quand elles mesurent la menace. Pour ce faire, Thierry Auger préconise de s’appuyer sur l’analyse des événements anormaux, l’évaluation d’un niveau raisonnable et le retour d’expérience. Il tente de prévoir, en somme…

Et lorsque les villes doivent réinventer la mobilité autour du véhicule autonome, il est question… de prévision, de planification, d’étude d’impact, de simulation, de scénario, de modélisation. Le paradigme de la prédiction a-t-il à ce point la peau dure ? Le texte de Patrick Pélata laisse entrevoir en creux le vide que laisse le tsunami de l’incertitude lorsqu’il est question de décision et de construction d’un futur qui naîtra d’interactions complexes. Construire le futur, c’est l’imaginer. L’imaginer, à moins de le contrôler complètement, impose d’en prédire les grandes lignes. Le chemin est étroit entre l’usage nécessaire des outils du paradigme de la prédiction et la nécessaire distance qu’il faut garder vis-à-vis d’eux dans la démarche entrepreneuriale. Ils ne peuvent être que les fondations provisoires d’un futur que l’on souhaite construire et qu’il faudra faire évoluer. En zone sismique, il est sage de se doter de fondations souples et d’une capacité à reconstruire.

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n°135

Basculements merveilleux

Publié le mardi 11 décembre 2018

« Je suis en retard, je suis en retard ! » Alors qu’elle s’ennuyait, l’attention d’Alice est attirée par un lapin qui parle. Elle est intriguée quand elle constate qu’il tient une montre et porte un gousset. Elle le suit jusqu’à son terrier, où elle est entraînée dans une longue chute. Et là, c’est le basculement ! Dans un monde aux lois différentes, faisant la part belle à l’absurde, qui remet en cause l’ordre établi, un monde où règne l’excès et où le temps est déréglé…

Laure Leroy s’ennuyait-elle ? Quoi qu’il en soit, l’éditrice a vu passer mille et un lapins ressassant qu’ils étaient en retard dans des langues diverses, et dont les terriers ouvraient sur des mondes inconnus et fascinants. En refondant sa maison d’édition, elle a décidé de la faire basculer dans les littératures des langues dites rares, un monde plus complexe au premier abord, mais d’une richesse incommensurable une fois apprivoisé. En faisant le choix de ce monde peu connu, Zulma s’est construit une place à part dans l’édition française.

La fabrication additive, encore à ses balbutiements, le véhicule électrique, qui n’était alors qu’un pari lointain, ou les champions cachés ont été comme l’étonnant lapin d’Alice respectivement pour Michelin, Renault et les services économiques de l’État en région. Ils ont intrigué, on les a suivis, et un basculement s’est produit. La fabrication additive réduit les délais de réalisation des moules et améliore notablement la performance des pneus. Comme le véhicule électrique, elle entraîne une reconfiguration complète du marché, ses standards, ses chaînes de valeur, ses écosystèmes. Michelin et Renault ont gagné une avance décisive en se familiarisant avec ces mondes.

En s’intéressant aux champions cachés, des entreprises qui n’étaient pas dans son champ de vision, l’État a découvert un trésor insoupçonné dans le cadre d’une expérimentation en Normandie. L’action publique se rebâtit dans une inversion de perspective, autour des entreprises qui décollent plutôt que des filières qui s’essoufflent, et les relations État-entreprise prennent des formes nouvelles.

Aux Mureaux, le basculement est cognitif. Imaginer la ville, à la réputation désastreuse, comme une destination touristique paraît impossible. Sauf à se dire… que cela n’a rien d’impossible. C’est alors une réalité tout autre qui se dessine et petit à petit, à force de conviction, des possibilités se font jour. Sous l’impulsion de Jean-Marc Sémoulin, ce sont de plus en plus d’acteurs et habitants de la ville qui se prennent à rêver et participent à la réalisation du rêve.

Se retrouver du jour au lendemain dans un univers dont les lois nous sont inconnues… L’impact de l’œuvre de Lewis Carroll sur notre imaginaire tient sans doute à l’universalisme du thème du basculement et à l’angoisse qu’il peut générer. Sortir de sa zone de confort, injonction à la mode, traduit en creux cette difficulté à passer dans un contexte inconnu. Il tient aussi à ce que cette angoisse se double d’une promesse ténue de l’accès à un monde dans lequel suivre un lapin en retard peut vous donner une longueur d’avance. Un pays des merveilles ?

Thomas Paris

Édito du Journal de l'École de Paris du management n°134

 

De l'entrepreneur à l'entreprenant

Publié le lundi 23 avril 2018

On sait depuis Schumpeter l'importance de l'entrepreneur, qui fait évoluer la société par un processus de destruction créatrice. Dans une période de mutations, on attend beaucoup de lui, on le valorise, on invente des lieux où il peut éclore, comme les incubateurs de start-up, on crée des financements pour le soutenir. C'est très bien, mais cela ne suffira pas. D'une part, les entreprises sont loin de pouvoir employer tout le monde. Résumer la vie sociale à la vie économique est alors un facteur d'exclusion qui met en péril la paix civile. Au cours des 1 300 séances de l'École de Paris, nous avons vu nombre d'acteurs qui, sans être des entrepreneurs, ont créé des activités génératrices de sens, de liens, de fiertés, d'insertion : Réseaux d'échanges réciproques de savoirs, Jardins de Cocagne, Voisins malins, gymnastique adaptée aux seniors, etc. Ils nous ont émerveillés et nous ont convaincus qu'il faut multiplier les démarches de ce type. Mais on ne peut pas dire que l'argent coule à flot dans leur domaine, ni qu'ils sont portés par le public, les médias et les politiques comme le sont les entrepreneurs.

Nous avons aussi vu, au sein de grandes organisations, des acteurs développant une énergie et une inventivité extraordinaires et prenant des risques pour rendre leur organisation plus agile et génératrice de sens : chez Michelin, chez OCP, à la Caisse d'assurance maladie des Yvelines, etc. Ce n'est pas le profit qui les guide, et pourtant ils jouent un rôle clé. Cependant, la pérennité de leurs contributions peut être fragile si leurs successeurs comprennent mal leur action et ne sont pas très attentifs à la poursuivre. 

Nous les appelons entreprenants. Il nous paraît important de mieux comprendre leur action et de les valoriser. C'est dans cet esprit que l'École de Paris lance un Manifeste des entreprenants et crée le blog du Jardin des entreprenants, qui a pour ambition d'aider à tirer des enseignements des entreprenants les plus inspirants, dans toute leur diversité.

Concilier compétitivité et solidarité

Publié le vendredi 17 mars 2017

Notre débat “L'inutilité, fléau moderne” a montré qu'il fallait concilier compétitivité et solidarité. 

Compétitivité pour faire en sorte que les productions de biens et services exposées à la concurrence internationale résistent à la pression, et même se développent. Elles sont en effet pourvoyeuses d'emplois directs et indirects et créatrices de richesses économiques. 

Solidarité, car les entreprises sont loin de pouvoir employer tout le monde. Il faut donc développer les productions de biens et services enracinées localement. On en connaît déjà : artisanat, commerce, TPE, administrations, services de santé, Économie sociale et solidaire, etc. Mais elles ne suffisent pas puisqu'il reste encore beaucoup d'inactifs. Si l'on veut éviter que l'inactivité menace la paix civile, il faut donc inventer de nouvelles solidarités et des mécanismes pour rendre finançables des activités utiles mais délaissées, comme dans l'opération territoires zéro chômeurs de longue durée. 

L'École de Paris se veut un lieu où les idées et les expériences nouvelles sont repérées et débattues. Elle a déjà abondamment montré, au rebours des idées reçues, qu'on peut être compétitif sans vivre en enfer et solidaire tout en étant efficace.  

Michel Berry

Agences bancaires : de la connexion à la relation

Publié le mardi 24 janvier 2017

On clame que la numérisation va faire disparaître nombre d'emplois, sans savoir combien, ni si les personnes remplacées par des machines pourront occuper les emplois créés. Mais dans quel cas l'Homme est-il irremplaçable par une machine ? 


Avec le succès de l'internet, on s'interroge sur l'avenir des agences bancaires. Éric Campos, du Crédit Agricole, a lancé une enquête pour savoir ce que les clients font dans une agence et a découvert que 87 % des visites correspondent à des opérations quasi-automatiques, 10 % à des prestations simples (prendre un carnet de chèque) et 3 % à la recherche d’un conseil ; c'est là, dans ces 3 %, que se crée la valeur ajoutée d'une agence.


Or, avec les modes de gestion classiques, les conseillers manquent souvent de temps, de compétence, voire de liberté, pour conseiller efficacement le client. Il faut donc repenser la relation avec le client et, pour cela, transformer l'organisation interne, développer un travail collaboratif, revoir le rôle du directeur, ainsi que libérer les agences du poids du siège. On verra la révolution engagée. Elle suppose de s'avancer en terrain "mou", sur lequel les adeptes de la bureaucratie ou les maîtres des logiciels se perdent. 


Claude Riveline distingue les connexions et les relations. Les premières se réduisent à des échanges d'information ou à du calcul, et excellent dans le "dur", alors que les secondes permettent de s'assurer, comme diraient des alpinistes, pour avancer en terrain "mou". Le dur est un champ de conquête pour la numérisation. Les hommes libérés aideront-ils à développer des relations terriblement déficientes, vu les places de la défiance, de la solitude et du sentiment d'inutilité ? Ce serait un effet vertueux d'une évolution qui nous fait peur, à condition de changer de… logiciel social et mental.

 

Michel Berry

Votre nouveau site

Publié le lundi 21 novembre 2016

Bienvenue sur le nouveau site de l'École de Paris du management. Comme vous pouvez le constater, sa présentation a changé, mais pas seulement. 

Votre compte personnel vous permettra de suivre vos demandes d'inscriptions aux séances, vos téléchargements de comptes rendus, vos abonnements, de créer des favoris et de mettre à jour vos informations personnelles. 

Une des nouveautés proposées est que vous pouvez vous inscrire aux séances directement sur notre site. Si vous le préférez, vous pouvez bien entendu continuer à vous inscrire auprès de Coralie Pelieu.

Pour votre premier contact, il vous faudra vous identifier ou créer votre compte. En cas de problème, n’hésitez pas à contacter Coralie qui se fera un plaisir de tout mettre en ordre. Vous pouvez désormais diffuser plus facilement nos textes, par exemple via vos réseaux sociaux. Les comptes rendus d'avant 2014 sont librement téléchargeables et, en ce qui concerne les plus récents, on peut maintenant en lire les deux premières pages. 

Je remercie Benoît Talabot, de FABERNOVEL, qui a créé cette nouvelle maquette, Simon Duflos, notre webmaster, qui l'a entièrement réalisé et Marie Vallée qui a suivi tout ce processus de son œil vigilant.

Je vous laisse découvrir les autres fonctionnalités de ce site. Comme il est tout neuf, il a sans doute encore quelques défauts et votre soutien sera précieux pour les identifier et les corriger. Ce site est le vôtre !

 

Michel Berry

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