Publié le jeudi 4 juillet 2019
Montée en charge, passage à l’échelle, “scalabilité”… Le succès des entreprises repose moins sur la conception de solutions nouvelles que sur leur capacité à les déployer. Martingale génétique des entreprises industrielles, c’est aussi, parfois de manière plus critique, celle des entreprises de l’ère digitale, les start-up. Cette course à la taille structure la vie économique, celle des marchés et celle des organisations. En déployant des solutions de façon massive, elle laisse des interstices ouverts, lesquels permettent le développement de niches…
La grande échelle et la singularité ne font pas bon ménage. Leur conciliation apparaît pourtant comme l’un de nos plus grands défis. Il n’est qu’à considérer la question de l’emploi pour nous en convaincre, et cette contradiction dramatique, pour reprendre les mots d’André Dupon, de la cohabitation d’un important besoin d’emplois et de l’absence de réponses pour les laissés-pour-compte. Le traitement de l’insertion n’a pas échappé à la règle de l’approche industrielle, se montrant incapable de prendre en compte la multitude des singularités derrière la masse des laissés-pour-compte. Avec un chiffre d’affaires de 80 millions d’euros, Vitamine T relève ce défi de l’insertion à grande échelle, tout en conciliant aussi action sociale et initiative économique.
La prévention, dans la santé, soulève le même type de défi. Les approches de mass média ont toujours donné lieu à des échecs. Le groupe VYV a fait le pari de la révolution de la prévention. Dans son cas, le traitement de la singularité à grande échelle – VYV touche 10 millions de personnes – se fait dans la combinaison d’une solution numérique et d’une plateforme téléphonique. Des processus et de l’humain.
Même articulation fine entre des processus et de l’humain chez le fonds d’investissement Kima Ventures, lequel est capable de traiter trente projets par jour et de s’engager dans une centaine de start-up chaque année pour s’affirmer comme “le business angel le plus actif au monde”. Modèle industriel, certes, mais avec une équipe de seulement trois personnes. En s’appuyant sur des processus très précis, elle parie sur des interstices et la capacité d’équipes à réussir le passage à l’échelle, dans un modèle qui mêle efficacité et bienveillance.
Singularité et grande échelle, action sociale et initiative économique, efficacité et bienveillance… Les lignes de crête sont des voies difficiles à tenir, mais prometteuses dans leur capacité à relever les défis entrepreneuriaux ou sociaux. Pour Heliatek, l’enjeu est double. L’entreprise entend contribuer au grand défi environnemental en s’appuyant sur des films photovoltaïques moins contraignants et plus vertueux que les panneaux solaires. Sur le plan entrepreneurial, il s’agit de trouver une place dans les nombreux interstices laissés par les panneaux solaires. Sa ligne de crête consiste à concilier l’industrialisation et l’adaptation de sa solution à des contextes variés.
Le projet de Valeo en Chine implique aussi de marcher sur deux jambes : être mondial et faire partie de l’écosystème chinois. Un écosystème caractérisé par la vitesse affolante de transformations qui vont faire passer le pays du statut d’usine du monde à celui de laboratoire du monde et qui la remettront en son centre. Sa capacité à concilier industrie et conception, masse et créativité, étatisme et entrepreneuriat y seront pour beaucoup. De la force du yin et du yang pour maîtriser les lignes de crêtes…
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