Ecov aide les collectivités à développer des lignes régulières de covoiturage, en complément des réseaux de transports publics, dans une logique de “service public partagé” assuré par les citoyens. L’idée est née d’un double constat : d’une part, l’urgence écologique et le besoin de justice sociale replacent la puissance publique au centre du jeu économique ; d’autre part, on ne saurait relever ces défis sans innover radicalement, exercice auquel les entreprises du secteur privé sont plus rodées que la puissance publique…

Exposé de Laure Ménétrier


Ne trouvez-vous pas désespérant d’être bloqué dans un embouteillage, quand tous les conducteurs sont seuls dans leur voiture ? Pour ma part, j’y vois un défaut flagrant d’optimisation du système de transport, d’autant que, dans le même temps, certains n’ont d’autre choix que de faire de l’autostop. En dehors des centres-villes, on ne trouve guère de transports collectifs efficaces, et quand des bus desservent des zones peu denses, ils sont souvent vides.

Les impératifs d’une mobilité durable

À de nombreux égards, les solutions de mobilité actuelles peinent à satisfaire le principe du développement durable : allier les impératifs économiques, écologiques et sociaux. Ainsi, 16 % des émissions de gaz à effet de serre proviennent-elles de voitures particulières, quand la pollution atmosphérique provoque 100 000 morts prématurées en France. Les ménages consacrent en moyenne 14 % de leur budget aux transports – la proportion est nettement supérieure pour les ménages modestes – et plus de la moitié des membres d’un foyer pauvre ont renoncé à un emploi faute de pouvoir s’y rendre, contre moins de 20 % pour la moyenne des ménages.

Les transports, cas d’école de l’intervention publique

Les transports n’échappent pas à l’invasion disruptive d’acteurs du numérique qui transforment des secteurs entiers et en captent la valeur, comme Uber, BlaBlaCar, Getaround (plateforme de location de voitures entre particuliers) ou Lime (location de courte durée de trottinettes électriques). Le terme ubérisation, désormais générique, provient d’ailleurs du monde de la mobilité. Ces acteurs ont bénéficié d’un afflux massif d’argent privé et ont vu leur valeur s’envoler. Leur rentabilité reste néanmoins problématique : Uber n’est devenu rentable que douze ans après sa création, fin 2021 – et encore, il le doit principalement à son service Uber Eats. Ces entreprises n’ont pas eu pour priorité de consolider un modèle économique, mais de croître à tout prix. Or, leur activité a eu un coût écologique – des centaines de trottinettes électriques ont été repêchées dans le port de Marseille – et un coût social, marqué par une précarisation des chauffeurs.

En réaction, certaines villes ont banni ces nouvelles formes de mobilité. Par exemple, New York impose un quota de chauffeurs Uber et a interdit les trottinettes électriques. Il semble donc que, pour préserver son acceptabilité, ce capitalisme galopant doive entrer progressivement dans le rang de l’intérêt général. Il est désormais soumis à une régulation plus soutenue et est appelé à collaborer avec les collectivités.

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