Christian Leclerc, médecin de campagne, constate que près de la moitié des patients se plaignent de troubles fonctionnels : fatigue, troubles du sommeil ou du transit, douleurs dorsales, etc. Pour mieux les soigner, il expérimente des médecines complémentaires, puis découvre qu’avec des micronutriments adaptés, on peut traiter nombre de ces troubles. Enthousiasmé par cette perspective, il crée PiLeJe pour mener trois actions de front : continuer les recherches, produire des nutriments et former médecins et pharmaciens à leur usage.


Exposé de Christian Leclerc

Quand je me suis installé comme médecin généraliste à Dun-sur-Auron, une petite commune de 4 000 habitants dans le département du Cher, j’avais une certaine expérience en tant que remplaçant et beaucoup de certitudes tirées de ma formation scientifique. Je savais poser un diagnostic à partir des symptômes objectifs et prescrire des solutions thérapeutiques reposant également sur des études cliniques objectives.

Des problèmes sans solutions

Mes certitudes ont rapidement été bousculées. Contrairement à ce que j’avais observé à l’hôpital, 80 % des patients me consultaient pour des problèmes fonctionnels, c’est-à-dire non liés à des pathologies. Appliquer les méthodes de l’hôpital à ces problèmes de santé était souvent inefficace, voire contre-productif.

J’étais souvent consulté, par exemple, par des gens fatigués ou anxieux, comme cette dame qui venait d’accoucher, était exténuée et pleurait dès qu’on la contrariait. J’ai mis cela sur le compte de la dépression post-partum et je lui ai donné un petit tranquillisant. Deux semaines plus tard, elle est revenue, car elle avait mal au ventre et présentait différents autres troubles. Je lui ai fait faire un bilan biologique, qui a seulement révélé un léger problème de cholestérol. Cela n’avait aucun rapport avec sa dépression, mais là encore, je lui ai donné un traitement. Trois mois après, j’ai appris qu’elle avait divorcé et déménagé.

J’avais aussi à soigner de nombreuses personnes qui effectuaient des travaux agricoles ou qui travaillaient à l’usine et souffraient de lumbagos ou de sciatiques. Dans 90 % des cas, je leur donnais un anti-inflammatoire, en comprimé si ce n’était pas trop grave ou en injection dans le cas contraire, accompagné d’un arrêt de travail et, éventuellement, de rééducation. Un jour, j’ai aperçu au marché un patient à qui j’avais donné, la veille, un anti-inflammatoire et qui semblait quasiment remis. Très fier de moi, j’en ai fait compliment à sa femme, qui a fini par me confier : « Vous savez, docteur, les médicaments, on ne les achète même pas. Mon mari vient vous voir pour l’arrêt de travail, mais pour son dos, il va voir le rebouteux, et ses collègues font pareil. » Mon amour-propre de jeune médecin en a pris un coup !

Autre exemple, dans les années 1970, lorsqu’un enfant avait de la fièvre, le médecin lui prescrivait systématiquement un antibiotique. Ne pas le faire équivalait à ne pas être un bon médecin. Je le faisais donc, mais, quinze jours plus tard, dans 30 % ou 40 % des cas, mes petits patients revenaient me voir pour des problèmes d’otites, ce qui m’interpellait. J’ai appris beaucoup plus tard qu’il existait un microbiote des parties aériennes et que, s’il s’agissait d’une infection virale, les antibiotiques systématiques détruisaient cette flore protectrice.

D’autres chemins que la médecine académique

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