Le développement de solutions de recharge pour les maisons individuelles, les entreprises et les copropriétés est un aspect négligé de la transition énergétique. Il conditionne pourtant l’essor du véhicule électrique. Zeplug et ChargeGuru se sont donné pour mission de relever ce défi, en s’appuyant sur une plateforme digitale performante et en fédérant un écosystème européen d’installateurs certifiés. En levant 240 millions d’euros pendant l’été 2022, Zeplug a montré sa capacité à convaincre de la solidité de son modèle de développement. 


Exposé de Nicolas Banchet

Si le développement des véhicules électriques est un élément clé de la décarbonation, il a un corollaire indispensable qui, dans un premier temps, semble avoir été quelque peu négligé : le déploiement de solutions de recharge adaptées à une diversité de besoins, en stationnaire et en itinérance, partagées et individuelles. Ce n’est qu’en 2020 que le Gouvernement a annoncé l’objectif de déployer 100 000 bornes publiques avant la fin de l’année suivante. Fin 2022, la cible n’était pas encore atteinte : un peu plus de 80 000 bornes étaient effectivement installées.

Développer les voitures électriques, et après ?

Qui accepterait de remplacer sa voiture thermique par un modèle électrique sans avoir l’assurance de pouvoir le charger à sa convenance ? Le nombre insuffisant de bornes a été l’un des principaux freins à l’achat de véhicules électrifiés depuis leur lancement. Tous les constructeurs automobiles se sont pourtant lancés sur le marché de l’électrique et ont engagé d’importants efforts pour diversifier leurs gammes. Peugeot a ainsi annoncé qu’il ne vendrait plus aucun modèle thermique en Europe à l’horizon 2030, avant même l’échéance décrétée par l’Union européenne de ne plus commercialiser ces véhicules en 2035. Pour les fabricants, l’accessibilité des solutions de recharge est déterminante : ils vendront d’autant plus facilement leurs véhicules électriques qu’ils pourront orienter leurs acquéreurs vers un installateur fiable de bornes individuelles à domicile. C’est à ce besoin que répond la société ChargeGuru, que j’ai créée en 2018 sur un modèle de plateforme inspiré d’Uber et des taxis G7. J’ai, en effet, été directeur général de G7 jusqu’en 2017 et j’en ai conduit la transformation face à la concurrence accélérée liée à l’arrivée d’Uber.

Qu’en est-il des copropriétés, où la bonne entente est rarement de mise et où personne ne souhaite payer pour son voisin ? Certains copropriétaires sont tentés de se brancher à une prise de façon sauvage et d’utiliser l’électricité des parties communes, mais, outre le fait que le procédé n’est guère civil, l’infrastructure des bâtiments n’est pas destinée à cet usage et le système risque vite de disjoncter. Zeplug propose aux copropriétés une solution simple, dont l’adoption ne donne pas lieu à d’interminables palabres en assemblée générale : la mise en place de l’infrastructure est gratuite et les résidents peuvent s’abonner au service progressivement. C’est un fier service rendu aux syndics, qui se trouvent souvent démunis face aux demandes des habitants d’équiper les parkings. Créée en 2014, Zeplug suit une belle croissance – en témoigne sa dernière levée de capital, d’un montant de 240 millions d’euros, intervenue en plein refroidissement du capital investissement, destinée à soutenir son expansion internationale en Europe et aux États-Unis. J’ai rejoint cette société en 2017 – je connaissais son fondateur –, alors qu’elle accélérait sa croissance et préparait des levées de fonds. Je codirige aujourd’hui les deux entreprises qui opèrent dans le même domaine, mais qui ont adopté des modèles d’affaires totalement différents.

À chacun ses besoins de recharge

Les deux start-up ont fait le choix de ne pas être présentes dans le segment de la recharge publique, qui présente une rentabilité trop aléatoire. Les bornes publiques, qui assurent une charge ultrarapide – presque aussi rapide qu’un plein d’essence – sont en effet coûteuses, de l’ordre de plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de milliers d’euros. La rémunération s’effectuant à l’acte – et non sur abonnement, par exemple –, il faut s’assurer que le trafic sera suffisant pour rentrer dans ses frais. L’emplacement de la borne est donc déterminant, le risque étant qu’un concurrent vienne installer des bornes juste à côté, comme un centre commercial ou une station-service.

Pour leur part, les particuliers privilégient la charge lente, permettant d’emmagasiner l’équivalent de 20 à 40 kilomètres par heure. Une nuit permet de faire le plein. Pour un usage quotidien, il est largement suffisant de brancher sa voiture deux à trois fois par semaine, sachant qu’un véhicule roule en moyenne 30 kilomètres par jour. Ces bornes privatives ne présentent pas de complexité technique particulière, hormis leur aptitude à piloter la charge en temps réel au regard de la puissance disponible sur le réseau. Les foyers qui les utilisent voient leur consommation électrique croître de 28 %, soit un surcoût de 30 à 40 euros par mois. Les deux tiers d’entre eux branchent leur voiture une à trois fois par semaine.

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