- Sous le feu des projecteurs
- De la liste rouge au tapis rouge
- Des ressources humaines décisives
- Choisir de s’exposer
- « Une société, dynamique et performante, qui a du cœur »
- Bâtir un plan d’action
- Le choix du mouvement
- Des luttes pour le pouvoir
- Desserrer l’étau de la spéculation
- Ça en valait la peine !
- Le général aux confins de l’empire
- Élargir le champ des possibles
En 2008, le groupe égyptien Orascom vend ses actifs algériens à Lafarge sans en avertir le gouvernement algérien, qui critique publiquement l’opération. Fin 2009, alors que de violentes manifestations anti-égyptiens éclatent, Lafarge décide d’exfiltrer d’Algérie ses cadres égyptiens. C’est dans ce contexte chaotique que Luc Callebat se voit confier Lafarge Algérie. L’aventure qui s’ensuit va faire de l’entreprise l’entité la plus performante du Groupe et amènera le gouvernement algérien à reconnaître sa contribution à l’économie du pays.
Exposé de Luc Callebat
Pour bien saisir cette histoire, il faut la resituer dans le contexte de l’Algérie à l’époque des faits, sachant que dans ce pays, la dimension mémorielle est importante. Lafarge a construit la première de ses cimenteries algériennes à l’orée du XXe siècle. Son implantation, jusqu’à sa nationalisation en 1968, a donc été largement associée, dans la mémoire collective des Algériens, à la présence française dans le pays. Après l’Indépendance, l’économie algérienne a connu une période dominée par un socialisme assez dur, avant de subir, dès 1991, les années noires de la guerre civile, opposant le gouvernement et l’armée à divers groupes terroristes islamiques.
À partir des années 2000, l’Algérie souhaite redresser son économie et, pour cela, recherche des investisseurs, en particulier dans le domaine du ciment. Face à la frilosité des grands acteurs du secteur, un homme d’affaires égyptien, Nassef Sawiris, va tenter sa chance avec son groupe, Orascom. Bénéficiant de larges avantages de la part de l’État algérien, il va réussir un investissement fulgurant, grâce à un schéma simple et robuste consistant à dupliquer son modèle initial et à envoyer, comme dans chacun des pays où il se développe, 150 cadres égyptiens, s’affranchissant ainsi des difficultés liées au recrutement et à la formation de cadres locaux. Or, en 2008, alors qu’il vient d’obtenir l’autorisation de construire une troisième usine, il décide soudain de vendre son groupe à Lafarge, dont il devient alors l’un des actionnaires de référence.
Rien ne change pour l’entreprise jusqu’à ce que le président Bouteflika dénonce dans un discours, au cœur de l’été 2009, les excès de l’ouverture aux investissements étrangers, en faisant expressément référence à Lafarge et à Orascom. Il reproche à ce dernier de s’être retiré sans consulter les autorités algériennes alors que le Groupe avait pleinement bénéficié d’aides publiques lors de son implantation. Ce discours est largement repris par la presse, qui reproche à Orascom cette plus-value indue et assimile cette vente à une trahison. En conséquence, le gouvernement prend des mesures qui vont dorénavant freiner les investissements étrangers.
Durant l’automne suivant, des émeutes anti-égyptiens éclatent dans le pays. Face aux risques encourus par ses 150 cadres expatriés, Lafarge fait le choix de tous les rapatrier. S’ensuit à la hâte une cascade de promotions des cadres algériens présents sur site afin de pourvoir au mieux aux exigences immédiates de la production, sans pour autant que leur capacité à tenir leur nouveau rôle soit assurée.
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