- Une passion pour l’industrie
- Une double articulation
- Chute des prix et émergence des génériques
- Conserver une capacité industrielle : un choix stratégique qui détonne
- L’investissement dans les biotechnologies
- Cepia : la production de principes actifs à façon
- La filialisation de Cepia
- Vers l’introduction en Bourse
- Le projet Pluton
- Une démarche entrepreneuriale de long terme
- Comment un manager industriel devient-il entrepreneur ?
- L’activité commerciale de Cepia
- Le point de vue des salariés
- De l’innovation de procédé
- La chimie a-t-elle un avenir ?
- Une revanche sur l’histoire… ou un abandon ?
- Vers la chimie verte ?
Fruit de la redéfinition du périmètre industriel de Sanofi, l’introduction en Bourse d’EUROAPI a été un succès dans un marché déprimé. Sanofi a ainsi fait émerger un leader mondial désormais capable de travailler pour tous les grands acteurs du marché et de saisir les opportunités de croissance. Cette opération offre un avenir florissant à six sites industriels, revendique une attache européenne symbole de souveraineté et illustre les efforts de réinvention des grandes entreprises.
Exposé de Philippe Luscan
Le groupe Sanofi est un extraordinaire “consolidateur” d’entreprises. En trente ans, il a procédé à 300 acquisitions, soit environ une par mois ! Après avoir racheté des laboratoires français, comme Synthélabo, il a fait d’autres acquisitions mondiales, comme Aventis, qui regroupait Roussel-Uclaf et Rhône-Poulenc. Aujourd’hui, c’est le groupe français le plus mondialisé par ses activités industrielles et commerciales. Pour bien comprendre le succès de l’introduction en Bourse d’EUROAPI et de l’opération de déconsolidation qu’elle constitue, il faut l’inscrire dans le temps long de l’histoire industrielle de Sanofi. C’est ce que je me propose de faire.
Une passion pour l’industrie
Après ma formation d’ingénieur à l’École polytechnique, puis à l’École des mines, avec une option biotechnologie qui m’a conduit à travailler sur les bactéries et les levures, j’ai démarré ma carrière chez Danone, dans une usine de production. J’ai ensuite rejoint Sanofi, en 1990, et j’ai consacré le reste de ma carrière, c’est-à-dire trente-deux années, aux activités industrielles de ce Groupe.
Dans ma promotion de l’École polytechnique, nous n’étions que deux à nous destiner à l’industrie. Quand j’ai expliqué au directeur que, depuis tout petit, je voulais diriger une usine, il m’a répondu : « Mon fils aussi, quand il était petit, il voulait être pompier. » Aujourd’hui, les métiers de la production sont à nouveau valorisés, mais, à l’époque, il était assez difficile, pour un ingénieur, de s’engager dans cette voie. Pour moi, l’industrie est toujours restée une véritable passion. Même lorsque j’ai été nommé patron industriel du Groupe, je rêvais de redevenir directeur d’usine, un métier extraordinaire.
Une double articulation
L’industrie pharmaceutique comprend deux grands secteurs : la production de principes actifs ou API (Active Pharmaceutical Ingredients) sous forme de poudres, que ce soit, historiquement, à travers la chimie et l’extraction végétale ou animale de molécules, ou, depuis une vingtaine d’années, à travers les biotechnologies ; l’assemblage des principes actifs et des excipients sous diverses formes galéniques (comprimés, gélules, produits injectables, etc.). Ce deuxième grand secteur, qui réalise les conditionnements primaire et secondaire des médicaments, s’apparente à l’industrie des cosmétiques ou à celle de l’agroalimentaire.
Outre cette première articulation entre deux grands secteurs, les entreprises pharmaceutiques doivent gérer la dualité entre l’exploitation d’un portefeuille de médicaments “mûrs”, dont certains peuvent être relativement anciens – le Doliprane, par exemple, existe depuis cinquante ans –, et la dynamique de l’innovation, notamment dans la cancérologie, les maladies auto-immunes et les maladies rares.
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