- La BSPP
- Les quatre étapes conduisant à l’échec
- Une institution forte de ses certitudes
- L’évolution de la menace terroriste
- Un exercice organisé le matin des attentats
- La nuit du 13 novembre 2015
- Ne pas s’endormir sur ses lauriers
- L’incendie de Notre-Dame de Paris
- L’exemple de l’armée russe
- Dans l’entreprise aussi
- Le point de bascule
- La couronne du Christ
- Construire la confiance
- Courage physique et courage managérial
Afin de rendre les sapeurs-pompiers de Paris plus agiles face à l’imprévu, Jean-Claude Gallet a participé à l’élaboration de nouvelles doctrines et pratiques. Elles se sont avérées particulièrement efficaces lors des attentats de novembre 2015, puis lors de l’incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Pour Jean-Claude Gallet, au-delà de la théorie, c’est grâce à des exercices pratiques réguliers que s’acquiert le discernement nécessaire pour savoir quand désobéir aux règles et s’affranchir des procédures pour gagner en agilité.
Exposé de Jean-Claude Gallet
À la sortie de Saint-Cyr, j’ai servi pendant seize ans au sein de la très prestigieuse brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), où j’ai évolué du grade de lieutenant à celui de général. J’ai également passé seize ans au sein du service du ministère des Armées en charge du suivi des crises géopolitiques. À ce titre, j’ai effectué plusieurs séjours à l’étranger, principalement dans des zones de conflits, en occupant différents postes : chef de mission, chef de service en ambassade, etc. Entre 2009 et 2015, j’ai été le chef de ce service de géopolitique, dont la mission est de renseigner l’exécutif sur les crises internationales. Puis, de 2015 à 2019, je suis retourné à la BSPP, où j’ai occupé successivement le poste d’adjoint en charge des opérations, puis celui de chef. Enfin, il y a un peu plus de trois ans, j’ai démissionné pour rejoindre le monde de l’industrie et je travaille désormais chez Michelin, avec un rôle de conseil en matière de sécurité incendie, de sécurité industrielle, de cybersécurité, de sûreté, d’éthique, mais aussi d’intelligence économique.
Plutôt que de vous présenter un exposé théorique sur la notion d’agilité, je vais vous raconter la façon dont la BSPP a été amenée à adopter une démarche d’agilité depuis quelques années, et a illustré ce nouveau mode de fonctionnement lors de deux événements en particulier, les attaques terroristes de novembre 2015 et l’incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris en avril 2019.
La BSPP
La brigade de sapeurs-pompiers de Paris est une unité militaire. Créée par l’empereur Napoléon en 1811, elle recrute des officiers issus de différentes armes (génie, infanterie, cavalerie, etc.). Forte de 8 500 hommes et femmes, elle défend Paris intra-muros, mais également la petite couronne (Seine-Saint-Denis, Hauts-de-Seine, Val-de-Marne). Nous disons, en plaisantant, que le soleil ne se couche jamais sur son territoire opérationnel, car, outre l’Île-de-France et le centre d’essai de la Direction générale de l’armement à Biscarosse, dans les Landes, la BSPP gère également un détachement qui défend le CNES (Centre national d’études spatiales) à Kourou, et des officiers et sous-officiers mis à disposition des ambassadeurs sur le continent africain et jusqu’à Wallis-et-Futuna, où ils sont rattachés au préfet.
La BSPP dispose d’un budget de 500 millions d’euros et assure 500 000 interventions par an, dont 13 000 sur des incendies. C’est le premier service de secours en Europe et le troisième dans le monde. Au fil du temps, la BSPP a développé une efficience tactique reposant sur des procédures, de l’innovation et des retours d’expérience permanents pour faire face aux risques classiques tels que les incendies, les explosions et les accidents. Néanmoins, son rôle le plus important est sans doute celui de garantir l’équité dans la qualité du service rendu pour toute personne en détresse située sur son territoire, qu’elle vive dans le 6e arrondissement de Paris ou dans une banlieue difficile du Val-de-Marne.
Depuis quelques années, elle a été confrontée à de nouveaux fléaux, comme la violence sociétale – illustrée, par exemple, par le mouvement des Gilets jaunes – et, surtout, les attentats terroristes. Face à des forces antagonistes qui veulent entraver son action (ce qui n’existe pas dans le cas d’un incendie, sauf s’il est allumé par un pyromane, ni dans le cas d’une inondation ou d’un accident de la circulation, qui sont des dynamiques dénuées d’intelligence), elle doit savoir renoncer à l’application de certaines procédures si, dans des situations rendues à dessein complètement imprévisibles par l’adversaire, celles-ci peuvent retarder la prise de décision et se transformer ainsi en piège. C’est à cette agilité que je me suis efforcé d’acculturer les équipes de la BSPP entre 2015 et 2019.
Les quatre étapes conduisant à l’échec
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