L’heure est aux réouvertures. Deux illustres institutions parisiennes, plongées dans l’oubli depuis de longues décennies, ont rouvert leurs portes ces dernières années, en se mettant au passage à l’heure du troisième millénaire. Le Collège des Bernardins, héritage cistercien du XIIIe siècle, retrouve sa mission originelle, au carrefour de la spiritualité et de la connaissance, de la foi et de la raison. Sa nouvelle ambition s’ancre dans notre époque : il s’agit de travailler à préparer notre avenir collectif, en mettant la mondialisation au coeur de ses problématiques. L’ouverture y est totale : le Collège s’appuie sur le patrimoine chrétien, mais se veut lieu de dialogue, qui entend dépasser les frontières disciplinaires ou donner une place à la réflexion des praticiens.
La réouverture de la Gaîté Lyrique a, elle, été placée sous le signe du numérique et des musiques actuelles. Derrière cette audace voulue par la ville de Paris, se profile une histoire entrepreneuriale qui montre la voie à des approches renouvelées en matière d’action culturelle. La Gaîté Lyrique a été confiée à une entreprise de taille modeste au moment du dépôt du dossier, devenue par la suite un acteur notable de la culture en France. Steven Hearn, fondateur de la holding culturelle Scintillo, explique comment son parcours l’a amené vers une approche de la culture qui fasse une plus grande place aux logiques entrepreneuriales.
Le numérique ouvre des mondes encore largement inexplorés. En matière de bien-être, par exemple, si les usages sont encore embryonnaires, ce sont entre vingt et trente mille applications qui existent d’ores et déjà, pour un marché, celui de la m-health, représentant six milliards de dollars. Christophe Deshayes et Robert Picard présentent la démarche originale qu’a initiée le Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies (CGEIET) sur l’intuition que la multiplication des services liés au bien-être adossés aux technologies numériques était peut-être l’arbre qui cache la forêt.
Chercheur au CEA, Christophe Bureau est devenu entrepreneur sur un projet d’essaimage, avec la conviction que la technologie d’électrogreffage de polymères, issue du nucléaire, pouvait avoir des débouchés dans d’autres domaines, comme... la santé. Via une aventure entrepreneuriale aux multiples rebondissements, une technologie aux propriétés de collage a ainsi pu être mise au service du traitement des maladies cardio-vasculaires, et représenter un potentiel de deux cents millions d’euros d’économie par an pour la Sécurité sociale.
Le succès de la Logan bouscule nombre d’idées reçues. Pour Christophe Midler, il s’agit bien là d’une innovation de rupture, car la conception du véhicule a reposé sur une déstabilisation des systèmes et des métiers. En particulier, la logique de diffusion a été pensée de manière nouvelle, en partant d’une part des pays émergents au lieu de déployer à l’international des véhicules conçus pour l’Europe, d’autre part de la clientèle la moins solvable pour ensuite monter en gamme. Dynamique d’ouverture à des marchés nouveaux, approche de réouverture pour dépasser les schémas établis.
L’idée d’ambition est présente dans chacune des aventures de ce numéro, mais une ambition marquée par une prudence et une humilité, une ambition réalisée pas à pas. S’ouvrir des mondes, c’est d’abord s’ouvrir.