Exposé de Jean-Marc Sémoulin

Envisageriez-vous de prendre quelques jours de vacances aux Mureaux ? Il y a fort à parier que la question vous paraisse incongrue, tant cette ville des Yvelines est associée à des images de révolte urbaine plutôt qu’à des escapades bucoliques.

Une solidarité internationale et de proximité

Pourquoi me suis-je pris à rêver que Les Mureaux deviennent une destination touristique ?

Transformer la violence

Tout a commencé durant la guerre en ex-Yougoslavie, qui m’a d’autant plus frappé qu’elle se jouait à nos portes. J’avais été particulièrement marqué par les images d’un Sarajévien dont la fille venait d’être touchée par un sniper. Prenant son enfant dans les bras, il criait au tireur : « Viens boire un café à la maison et dis-moi pourquoi tu as fait cela. Je veux comprendre. » Je me suis décidé à partir pour la Bosnie avec un camion d’aide humanitaire. Cette action a peu à peu pris de l’ampleur, au point d’être aujourd’hui orchestrée par une association de dix salariés. Nous envoyons toutes les trois semaines un semi-remorque vers des populations dans le besoin.

À nos débuts, notre camion a été incendié. Nous étions implantés dans un quartier difficile de Poissy, à La Coudraie. Repensant à cet habitant de Sarajevo qui m’avait tant marqué, j’ai publié dans le journal une lettre interpellant l’incendiaire : « Qu’as-tu voulu dire en t’attaquant à ce camion d’aide humanitaire ? Viens boire un café à la maison pour me l’expliquer. Je t’emmènerai à Sarajevo et te montrerai à quoi il servait. »

Le lendemain, une association de Chanteloup-les-Vignes m’a contacté. Elle était prête à m’envoyer des jeunes dont l’un des passe-temps était de brûler des voitures. Plus précisément, elle proposait à des jeunes étant sous le coup d’amendes de les acquitter, en échange de quoi ils travaillaient une semaine dans une association. Nous avons accueilli quatre garçons dans ce cadre. La presse locale a publié leur photo, posant fièrement devant notre camion. Cette reconnaissance les a bouleversés : « Je ne savais pas que l’on pouvait passer dans le journal en faisant le bien ! » m’a dit l’un d’eux, plus habitué à voir les journalistes relater les délits des bandes locales. Ce fut un déclic : moi qui peinais à trouver des aides pour préparer les convois humanitaires, j’avais trouvé un vivier. Nous avons transformé notre structure en un chantier d’insertion, appelé La Gerbe. Il accueille aujourd’hui 25 salariés en retour vers l’emploi et 10 permanents, pour un budget de 1,4 million d’euros.

Au cours de nos collectes de marchandises, il nous arrivait de trouver des pièces de collection qui n’avaient pas leur place dans des convois humanitaires. Nous avons décidé de les revendre. Ainsi avons-nous ouvert une ressourcerie, nouvelle occasion d’employer du personnel en insertion.

Reconstruire les hommes et les parcours

Parmi les personnes que nous suivons, certaines sortent de vingt ans de prison avec une image dégradée d’elles-mêmes, sans diplôme ni réseau, voire sans logement. D’autres viennent d’obtenir le statut de réfugié et ont tout à construire. Si nous commencions par traiter leurs difficultés matérielles, nous serions d’emblée paralysés par une montagne de problèmes. C’est pourquoi notre clé d’entrée consiste à valoriser leurs compétences : comment capitaliser sur ce qui a fonctionné dans leur vie ? Un ancien chef de bande aura des qualités de manager, un voleur de voitures sera un as de la mécanique… Ainsi reconstruisent-ils leur propre estime. Nous nous attachons à les intégrer dans un réseau, tandis qu’une assistante sociale les aide à résoudre leurs questions matérielles. Chaque petit pas est une réussite que nous célébrons. Cette méthode fonctionne pour la plupart d’entre eux. Sinon, à nous d’inventer d’autres solutions.

Libérer les imaginaires

Lors d’une réunion avec le département des Yvelines, qui nous soutient, celui-ci a pris acte de nos bons indicateurs de résultat – 80 % de remises en emploi réussies – mais nous a lancé une question qui fut un électrochoc : « Cela ne vous gêne-t-il pas de ne servir à rien ? » De fait, le chômage ne cessait de croître dans le territoire. J’ai compris que nous parvenions à peine à ralentir un train qui filait droit dans le précipice. Nous ne pouvions pas nous transformer pour autant en “usine à insertion”, étant incapables de proposer à 150 personnes l’accompagnement soutenu et individualisé que nous réservions à une trentaine. Comment aller au-delà ?

Cette fois, le déclic est venu d’une conférence. Ce sont nos croyances qui guident nos décisions, y a expliqué l’orateur. Si elles sont fausses, elles nous font faire de mauvais choix. Je me suis appliqué cet argument : que pouvais-je donc croire de faux ? Le conférencier a ensuite parlé d’interculturalité, de l’aura dont jouissait la France pour sa gastronomie, mais également de la réputation déplorable de son accueil, bien qu’elle fût une destination touristique majeure. Selon lui, le Français moyen pense que les touristes se rendent là où lui-même part en vacances, jamais là où il réside. En tant qu’habitant des Mureaux, je me reconnaissais dans ce portrait. Et si j’avais tort ? Si des touristes venaient aux Mureaux, que cela changerait-il ?

À l’issue de cette conférence, j’ai soumis mon idée à la cantonade. Après des éclats de rire, les suggestions ont fusé chez mes interlocuteurs. Leur imaginaire était en route. On m’a appris que le tout premier hydravion avait décollé des Mureaux. Pourquoi ne pas relancer cette activité ? Un document partagé a été créé pour recueillir toutes les idées de ce type. Le conseil d’administration de La Gerbe a accepté que je consacre une part de mon temps à fouiller ce trésor que j’avais le sentiment d’avoir découvert.

Une condition me paraissait essentielle : Les Mureaux ne deviendraient une ville de tourisme que si les quartiers s’engageaient volontairement dans la démarche, indépendamment de la municipalité. C’était la condition pour que nous soyons écoutés. Après dix ans d’activité du chantier d’insertion, qui avait remis en emploi 300 personnes, nous jouissions d’une image favorable auprès des populations. Avec elles, nous avons créé le label Tourisme et coopération. Notre ville multiculturelle compte en effet 89 associations issues de la diaspora et soutenant des projets au pays : rénovation d’une école, forage d’un puits… Les revenus de notre activité touristique alimenteraient un fonds de solidarité internationale en faveur de ces initiatives.

Quel tourisme pouvions-nous donc inventer aux Mureaux ? N’ayant pas de vestiges à valoriser, nous nous sommes inspirés d’une commune dont l’attractivité a été générée de toute pièce par la création du Puy du Fou1 et qui tire depuis 100 % de sa richesse du tourisme. Sous cet angle, le problème des Mureaux n’était plus que 20 % de ses habitants soient au chômage, mais que 80 % travaillent à une activité non touristique. Le tourisme nous ferait-il atteindre le plein emploi ? Le défi était d’autant plus beau que, si Les Mureaux le remportaient en partant de zéro, n’importe quelle ville pourrait y parvenir. Nous pouvions construire une expérience reproductible ailleurs.

C’est ainsi que nous nous sommes érigés en ville pilote du plein emploi, invitant des acteurs extérieurs à participer, avec nous, à la recherche de solutions profitables à tous. Nous sommes également portés par le réseau des “villes en transition”, dans lequel notre commune figure en bonne place grâce à son investissement poussé dans le développement durable : écoquartier, écoparc, bâtiments publics à haute qualité environnementale… Nous réfléchissons en outre à l’opportunité de rejoindre la dynamique Territoires zéro chômeur de longue durée2, qui présente l’intérêt d’être conceptualisée et suivie de très près. Enfin, nous avons l’ambition de faire des Mureaux une “ville du bien vivre ensemble”, où les communautés se côtoient en harmonie.

Mille richesses cachées

Pour lancer cette dynamique baptisée Vivre Les Mureaux, nous avons sollicité des personnalités à titre individuel tout autant que pour l’institution qu’elles représentaient. Toutes pouvaient enrichir notre base d’idées. À ce stade, nous ne savions pas davantage où nous allions.

Pour affiner le projet, je suis parti à la rencontre de populations que je n’avais pas l’habitude de fréquenter – des jeunes adeptes du rodéo urbain par exemple –, pour piquer leur curiosité : « Avez-vous entendu dire que la ville des Mureaux allait devenir touristique ? » Après l’inévitable quart d’heure d’hilarité, leur imagination se mettait en marche. Si nous leur confiions trois touristes, qu’en feraient-ils ? Comment donneraient-ils aux visiteurs l’envie de revenir avec d’autres ?

Invariablement, je m’entendais répondre qu’il n’y avait aucune raison de venir aux Mureaux, encore moins d’y revenir… sauf pour goûter les plats des mamans. Nous avons découvert qu’une application mobile, VizEat, organisait des repas chez l’habitant. Avec nos 100 nationalités, nous pouvions faire découvrir les gastronomies turque, sénégalaise, tibétaine, sahraoui… et, plus encore, proposer une immersion dans ces cultures. Cette plateforme virtuelle présente l’intérêt de régler d’avance les questions d’argent, puisque la transaction se fait en ligne, de sécuriser l’invité, qui sait précisément chez qui il va, mais aussi de responsabiliser les habitants. En effet, comme sur Airbnb, le visiteur note ses hôtes et la qualité de son expérience. C’est l’occasion de convaincre les familles de veiller à la propreté des abords de leur immeuble, et de persuader les jeunes de ne pas toucher à la voiture des touristes – voire de la protéger. Nous sommes devenus le projet “responsabilité sociale” de VizEat. La commission de 20 % prélevée par le site est reversée à notre fonds de solidarité internationale.

Nos communautés ont mille autres richesses à offrir. Certains de nos habitants mauritaniens, aujourd’hui ouvriers chez Renault, sont d’anciens chameliers. Pourquoi ne pas proposer des promenades à chameau aux Mureaux, avec découverte de la Mauritanie et de sa gastronomie ? De même, pourquoi ne pas faire de nos tours d’immeuble les plus hauts murs d’escalade de la région parisienne, en confiant l’accueil des sportifs à d’anciens sherpas Tibétains qui en profiteraient pour parler de leur pays et faire goûter leur cuisine ? Dans tous les cas, il ne s’agit pas de faire visiter Les Mureaux comme un zoo urbain, mais de susciter des rencontres et des expériences partagées.

Notre ville est dotée d’un aérodrome. Inutile de préciser que les habitants des Mureaux n’ont guère les moyens de le fréquenter. Ses 600 adhérents sont pour la plupart des dirigeants d’entreprise parisiens. Ils ont accepté d’organiser des baptêmes de l’air à un prix modéré, 30 euros, survolant le parc de Thoiry, ses éléphants et ses girafes. Les jeunes des quartiers en ressortent euphoriques, convaincus que leur ville est belle. Les pilotes partagent avec eux un moment de joie et délaissent peut-être quelques préjugés.

Des actions similaires peuvent être imaginées avec la base de loisirs des Mureaux, qui abrite notamment le Club nautique de Paris. Somme toute, nos initiatives se déploient dans cinq formes de tourisme : artistique, industriel, culinaire, historique et sportif.

Une structure souple et diversifiée

Avec l’aide de l’incubateur La Ruche Factory, nous accueillons et accompagnons des porteurs de projets. Certains nous confient des idées qu’ils ne souhaitent pas développer eux-mêmes. Elles sont libres de droits et nous cherchons des entrepreneurs qu’elles pourraient intéresser. D’autres désirent réaliser un projet, mais n’envisageaient pas de le faire aux Mureaux. Nous avons un atout majeur à leur proposer : l’accès à un écosystème susceptible de faciliter leur lancement.

Tous les mois, se tient une rencontre de citoyenneté participative d’une heure, dite Poum-Poum (bruit du cœur battant de la ville). Nous y faisons le point sur les initiatives en cours et prévues, et les habitants qui le souhaitent peuvent y décrire un projet en trois minutes. Cela nourrit leur volonté d’agir.

Nous organisons aussi, depuis plusieurs années, des Journées du vivre-ensemble, sans nier les risques de friction que peuvent occasionner certains rapprochements. Pendant dix heures, nous enfermons 650 personnes dans une salle des fêtes, y compris des communautés qui s’ignorent : Marocains et Sahraouis, élus de droite et de gauche, imams et prêtres… Elles assistent ensemble à des conférences, s’adonnent à des danses et autres moments festifs, autant d’occasions d’apprendre à se connaître. Y voir un imam et un prêtre se faire l’accolade est un geste extrêmement fort.

Citons aussi les BarCamps, ateliers participatifs au cours desquels des groupes d’habitants – des seniors au chômage, par exemple – sont invités à livrer des idées de projets pour la ville.

Toute cette démarche est portée par un pôle territorial de coopération économique (PTCE) créé à cet effet. De statut associatif, il permet de réunir des citoyens, des associations, des entreprises, des écoles ou centres de recherche (HEC siège à son conseil d’administration), des grands groupes ou encore des collectivités. Son conseil d’orientation est constitué des principaux financeurs. Bientôt s’y ajoutera un conseil de médiation accueillant des “sages” de la ville (imam, prêtre, représentant de la mairie, sportif…). C’est aujourd’hui le plus grand PTCE de France, avec 125 membres. Nous en visons 2 000. Son budget est de quelque 250 000 euros, soit 10 euros par habitant. Nous le voulons agile et créatif.

Les Mureaux, ville nouvelle ?

Quelques indices révèlent déjà que la ville a changé. Hier, quand nous voyions des poubelles déborder, nous pestions contre la mairie. Aujourd’hui, nous ramassons les détritus pour donner aux touristes une belle image de la ville. Cette dynamique est prodigieusement contagieuse. Nous prenons soin d’un territoire qui est devenu notre outil de travail. Nous entendons redorer son image et faire en sorte que ses habitants en soient fiers. Nous avons invité des journalistes à y vivre des expériences inédites, eux qui se contentaient jusque-là de compter les voitures incendiées dans nos quartiers. BFM Paris nous a consacré un magnifique reportage, relatant un baptême de l’air et un repas chez l’habitant. La journaliste avait les larmes aux yeux : elle s’était découvert, disait-elle, une deuxième maman aux Mureaux. En moins d’un an, la ville a suscité plus de cent articles positifs.

Les préjugés restent malgré tout tenaces. Nous avons ainsi appris que les cadres d’ArianeGroup, dont le siège est aux Mureaux, avaient pour consigne de ne pas traverser la ville. Après enquête, il s’est avéré que cette mesure datait des émeutes de 2005... Si ne serait-ce que 10 % des 3 000 salariés du site déjeunaient en ville, quel changement cela engendrerait-il ! Nous nous sommes rapprochés de la direction du Groupe pour imaginer des actions communes, des repas chez l’habitant notamment.

À mesure que nous avançons et déployons la dynamique, il nous faut produire des premiers résultats, pour convaincre. C’est la difficulté de l’exercice. J’ai le sentiment que nous plantons un verger, qui portera ses fruits dans le temps. Il faut l’agrémenter d’un potager pour nous nourrir au quotidien.

1. Laurent Albert, « La folle aventure du Puy du Fou », séminaire Création de l’École de Paris du management, séance du 21 février 2017.

2. Patrick Valentin et Michel de Virville, « L’opération Territoires zéro chômeur de longue durée », séminaire Économie et sens de l’École de Paris du management, séance du 11 janvier 2017.

Débat

Accomplir sa mission

Un intervenant : Vous semblez cumuler des qualités de leader, d’entrepreneur et de médiateur, le tout doublé d’une bonne dose d’humilité. Pourriez-vous nous dire quelques mots de votre parcours ?

Jean-Marc Sémoulin : Après une formation de maraîcher, j’ai débuté comme professeur de mathématiques dans un lycée agricole, face à des classes difficiles. J’y ai appris à parler à des jeunes plutôt indifférents à mon propos, à susciter leur intérêt et leur envie de se dépasser. J’enseignais encore lorsque j’ai monté mes premiers convois humanitaires, avant de m’y consacrer pleinement.

Étant protestant, j’ai été traversé par le désir d’être missionnaire. À l’aube de mon entrée dans la vie professionnelle, j’ai décidé de partir un mois en mission en Afrique : c’était peut-être là que Dieu me lancerait son appel. Le lycée agricole que je m’apprêtais à rejoindre était jumelé avec une école de Prague. Il m’a demandé de m’y rendre pendant l’été. J’ai refusé une première fois, puis une deuxième, y voyant une mise à l’épreuve de ma vocation. J’ai capitulé à la troisième sollicitation, interprétant cette insistance comme un déni de l’appel que j’attendais. Je suis donc parti en République tchèque. Le dimanche, je me suis rendu au culte à Prague. J’y ai été reçu par un ancien, francophone, qui m’a accueilli… comme le messie. Une place m’attendait devant l’autel, je pourrais délivrer un message, et toute l’assemblée m’invitait à déjeuner pour profiter de ma présence. J’étais stupéfait : il devait y avoir erreur sur la personne. Cet homme m’a expliqué que pendant les quarante ans de communisme, la communauté avait eu interdiction de se réunir. Elle se retrouvait clandestinement dans la forêt, jusqu’à ce qu’elle se fasse surprendre. Les uns ont été envoyés en prison, les autres dans des camps en Sibérie. Lui-même avait failli renier sa foi sous la torture. Il avait tenu bon en pensant à l’Église de l’Ouest, qui manifestait son soutien discret malgré la répression. Elle faisait parvenir des Bibles sous le manteau, par exemple. En 1989, à la chute du mur de Berlin, la communauté s’est endettée pour convier à une immense fête ces frères de l’Ouest qui avaient prié pour elle dans les temps difficiles, et qui avaient témoigné leur solidarité. Elle espérait qu’ils viendraient à sa rencontre pour partager, enfin, un moment de foi. Or, personne n’est venu. De nouvelles réjouissances ont été prévues, toujours sans succès. Deux ans plus tard, c’est pour moi, premier visiteur venu de l’Ouest, que cette communauté a célébré cette fête tant attendue. J’avais le sentiment d’être un imposteur : cette histoire était celle de mes parents, pas la mienne. Je me suis toutefois revu le dimanche précédent, priant pour les populations d’ex-Yougoslavie. À moi, aujourd’hui, de ne pas reproduire l’indifférence de mes aînés. Je me suis promis que dès la fin de cette guerre, je me rendrais à Sarajevo dire à mes frères de l’Est que j’avais prié pour eux. Tel était donc mon appel. Ces missions humanitaires n’étaient pas sans danger et certains de mes camarades n’en sont pas revenus. Cela m’a fait aborder la vie sous un nouveau jour, avec calme et détermination.

Distribuer le pouvoir d’agir

Int. : Faites-vous face à des tentatives de récupération par des mouvements politiques ou par des organisations qui ne seraient pas animées par l’intérêt commun ?

J.-M. S. : Les statuts du PTCE précisent que notre démarche ne peut servir aucune campagne électorale. Si un membre de notre conseil d’administration s’engage politiquement, il doit quitter la structure. Avant de lancer le projet, nous avons travaillé six mois avec les quartiers, en manifestant intentionnellement notre indépendance vis-à-vis de la mairie. Je m’étais contenté d’assurer au maire que je n’avais aucune intention politique. Notre première réunion officielle fut quelque peu houleuse : « Et si la mairie disait non ? », nous a opposé un élu. Je lui ai répondu que nous étions conscients du risque, notre avantage étant que l’on pouvait changer d’élus, tandis que les habitants restaient en place. Nous n’avons plus été inquiétés.

Int. : La mairie apporte-t-elle un soutien actif à vos initiatives ?

J.-M. S. : Le maire des Mureaux me qualifie de perturbateur positif et estime que nous avons fait basculer la mairie en mode “start-up”. Chaque semaine, deux de ses collaborateurs passent deux heures à mes côtés pour faire le point sur les projets à venir et les démarches à entreprendre. Cela permet d’avancer vite. Les équipes municipales n’hésitent pas à nous faire part de leurs idées. Deux élus qui ne se représenteront pas aux prochaines élections participent aussi à notre conseil d’administration.

J’ai toutefois dû m’imposer pour acquérir ce pouvoir d’agir. Ma méthode est simple : chaque fois que l’on m’oppose un refus, je sollicite l’échelon supérieur, quitte à remonter jusqu’au ministre. Une fois l’accord obtenu, je redescends la chaîne hiérarchique pour informer tous les maillons que le projet est lancé, et surtout pour leur proposer d’y prendre part. Ils sont tellement étonnés de cette absence de rancœur qu’ils me suivent. Pour un événement que nous projetions au parc Molière, par exemple, nécessitant d’autoriser des artistes à se produire en public, je me faisais renvoyer sans fin d’un service municipal à l’autre. Chacun de mes interlocuteurs était capable de bloquer mon projet, mais aucun n’avait l’autorité de me donner son aval. J’ai fini par leur annoncer que l’événement se tiendrait, et que je délivrerais en mon nom des autorisations aux artistes. Si j’étais hors la loi, que l’on vienne m’arrêter. Aujourd’hui, la mairie m’aide à développer l’événement !

Je souhaite convaincre les habitants qu’eux aussi peuvent s’emparer de ce pouvoir d’agir. Illustration parmi tant d’autres, la plupart d’entre eux ne fréquente pas spontanément le cinéma de la ville. Nous leur avons proposé de programmer les films de leur choix, à condition qu’ils fassent venir des spectateurs. À chaque fois, ce fut salle pleine.

Un plan de rénovation urbaine de très grande ampleur a été déployé aux Mureaux. J’étais émerveillé de voir les barres d’immeubles tomber et être remplacées par un parc. Au contraire, les habitants étaient scandalisés par cette destruction, alors que, disaient-ils, jamais personne n’aurait osé toucher à une maison du centre-ville. En évoquant avec eux nos projets touristiques, nous les avons incités à rêver d’un nouvel environnement. Les lieux de villégiature ont souvent une voie piétonne offrant divers agréments. Pourquoi ne pas en aménager une dans le parc Molière, cette coulée verte qui longe une rivière et traverse les quartiers ? « La mairie ne l’autorisera jamais ! » nous ont dit les habitants. Et nous de leur lancer un défi : « Faisons des propositions concrètes et les élus les accepteront certainement. » Cela a changé la donne.

Les Mureaux urbi et orbi

Int. : Vous n’hésitez pas à associer les communautés religieuses à vos projets. Comment est-ce perçu, par les habitants comme par les pouvoirs publics ?

J.-M. S. : Nous travaillons avec les communautés musulmanes et chrétiennes – catholiques, protestantes et évangéliques. Nous avons convaincu les autorités publiques que si nous les tenions à l’écart du projet, nous renierions l’âme de la ville et affaiblirions notre impact. Encore fallait-il que ces communautés religieuses agissent de concert. Dans cette optique, nous avons notamment institué des rencontres mensuelles de lecture de la Bible et du Coran. Nous y voyons un temps de laïcité, ce qui justifie que la mairie nous prête une salle à cet effet. La mosquée a tenu un forum de l’emploi dans ses murs, pour faire découvrir aux jeunes une palette de métiers et de parcours. Elle organise aussi des visites de son édifice, d’autant qu’elle se trouve être la première mosquée labellisée Haute qualité environnementale de France.

Int. : Votre action a-t-elle un impact sur la ville dans son ensemble, sur le centre historique des Mureaux comme sur les quartiers sensibles ? Touche-t-elle également les communes voisines ?

J.-M. S. : Nous veillons à ne pas réserver notre action aux zones sensibles. Nos réunions mensuelles, par exemple, se tiennent toujours dans des endroits différents. Elles sont tant appréciées que les habitants du centre-ville n’hésitent pas à s’y rendre lorsqu’elles ont lieu dans les quartiers, et inversement.

Pour cette même raison, nous sommes prudents vis-à-vis de la dynamique Territoires zéro chômeur de longue durée qui cible des effectifs de 10 000 personnes, inférieurs à la population totale des Mureaux. Nous ne voudrions pas stigmatiser un quartier particulier ni créer une distorsion par rapport aux autres. Nous réfléchissons donc au ciblage le plus pertinent pour cette initiative.

Après quelques hésitations, nous avons aussi compris que notre projet devait comporter le nom des Mureaux, pour redorer l’image de la ville, quitte à englober sous ce nom des communes voisines comme Meulan ou Ecquevilly. C’est une logique plutôt inédite. Je me rappelle la présentation d’un plan de redéploiement touristique dans la communauté d’agglomération. L’intervenant détaillait les projets, penché sur une carte géographique au centre de la table. Il avait la main littéralement posée sur l’emplacement des Mureaux, comme s’il allait de soi que nous en étions exclus !

Int. : Votre démarche n’a-t-elle pas pour effet de déplacer les problèmes – la vente de drogue, par exemple – vers d’autres territoires ? Pour trois chômeurs de moins aux Mureaux, y en aura-t-il trois de plus dans une ville voisine ?

J.-M. S. : En 2017, l’interpellation violente du jeune Théo à Aulnay-sous-Bois a déclenché des manifestations, parfois tendues. Des voitures ont commencé à brûler à Chanteloup-les-Vignes. Un rassemblement a été annoncé aux Mureaux avec promesse de raser le commissariat ; la préfecture a dépêché un hélicoptère pour surveiller les mouvements de foule… Nous lancions tout juste notre projet, et des émeutes pouvaient le faire “capoter”. Nous scrutions les réseaux sociaux et les inondions de messages d’apaisement. Puis, nous avons décidé que nous n’étions pas obligés de subir la situation. J’ai déclaré sur un compte Twitter que la manifestation pour Théo aux Mureaux était tout simplement annulée. Nous avons redoublé d’adresse pour que ce message soit relayé. Nous avons également posté des équipes à la gare, pour éconduire les manifestants : « Le rassemblement a été annulé, mais vous avez encore le temps de rejoindre celui de Paris ! » Certes, nous les avons renvoyés ailleurs, mais l’exemple peut aussi servir à d’autres villes et leur démontrer qu’elles peuvent prendre leur destin en main.

Int. : Votre projet a une dimension urbi – recréer du lien social – et orbi – faire venir le monde aux Mureaux. La seconde semble toutefois moins présente que la première. Avez-vous envisagé d’organiser un festival du monde dans les quartiers ? Ce pourrait être un motif de fierté pour votre ville – tout comme le festival des Vieilles charrues se targue d’accueillir des pointures internationales dans la campagne bretonne.

J.-M. S. : Notre Journée du vivre-ensemble annuelle est l’occasion d’accueillir des personnalités, comme Plantu en 2017 ou le haut-commissaire à l’engagement civique il y a trois ans. Depuis, ce dernier s’invite à chaque édition ! Nous créons ainsi un réseau d’“amis des Mureaux”, porté activement par notre groupe LinkedIn Les Mureaux ville d’innovation.

Drogue et autres pilules amères

Int. : La principale activité économique de certains quartiers est la vente de drogue. Or, vos projets dérangent probablement la routine des professionnels de la délinquance. Quelles relations entretenez-vous avec eux ?

J.-M. S. : Nous ne pouvons pas toucher le dealer lui-même, dont le train de vie est confortable, mais ses guetteurs : leurs revenus moindres les rendent plus sensibles à nos arguments. Pour autant, nous pénalisons le dealer en lui retirant ses acolytes. Nous nous efforçons même de décourager ses clients, qui viennent souvent de Versailles et Saint-Germain-en-Laye. Nous les prévenons que la photo de leur plaque d’immatriculation sera publiée sur Facebook. Du reste, la seule présence de touristes dans les quartiers dérange les trafiquants, qui aspirent à la discrétion.

Les grands dealers savent aussi qu’après leur probable séjour en prison, ils auront besoin de notre structure d’insertion s’ils souhaitent changer de voie.

Int. : Il arrive probablement que des porteurs de projets dérapent ou se montrent incapables de mener à bien leur mission. Avez-vous la légitimité de les recadrer ou confiez-vous cette tâche à une structure tierce ? Comment faites-vous passer les pilules amères ?

J.-M. S. : Nous n’agissons pas à la place des individus mais les responsabilisons, sans angélisme, bien que nous soyons confrontés en permanence à des situations dramatiques. Il y a peu, La Gerbe a accueilli un SDF qui vivait dans la rue depuis dix ans. À la fin de sa première journée de travail, il n’a pas quitté les locaux. Étant le dernier à partir, je lui ai demandé de sortir. Alors que je fermais la porte, il m’a lancé : « C’est tranquille pour toi ? ! Et moi, je reste là ? ». « Oui, lui ai-je répondu, c’est tranquille, je suis heureux de rentrer chez moi, de retrouver ma femme et mes enfants. Mieux vaut que ce soit toi qui dormes dehors que moi, tu sais mieux faire. Profite de tes dernières nuits dans la rue, repense au travail que tu as fait aujourd’hui. À la fin de la semaine, tu recevras ta paie et tu pourras aller à l’hôtel. À la fin du mois, tu intégreras peut-être un foyer, puis, si tu persévères, un logement. C’est toi qui te sors d’affaire. Pour ma part, j’ai besoin de toi pour charger mes camions d’aide humanitaire. » Il a tenu bon et s’est installé chez lui six mois plus tard.

À l’inverse, quand nous nous rendons compte que certains salariés en insertion continuent leurs trafics, nous rompons leur contrat. Nous leur expliquons que nous ne sommes pas là pour les couvrir et que nos chemins ne se sont pas croisés au bon moment. Mais dans quelques années, quand ils sortiront de prison, ils auront leur place ici. De fait, certains reviennent lorsqu’ils sont prêts à changer.

Lorsque je vois un jeune désœuvré au pied d’une tour, je lui annonce que dans sept ans, quand la ville aura atteint le plein emploi, il sera le dernier idiot à tenir le mur ! S’il saisit sa chance, nous sommes prêts à lui ouvrir notre carnet d’adresses et à l’aider à réussir. Le choix lui revient.

Int. : Vous venez de donner une magnifique leçon de management, qui ébranle un certain nombre d’idées reçues ! Aussi motivées et déterminées que soient les personnes issues de votre chantier d’insertion, je peux toutefois imaginer que des employeurs soient réticents à les embaucher. Comment parvenez-vous à les convaincre – lorsqu’il s’agit d’anciens détenus, par exemple ?

J.-M. S. : Nous testons les candidats pendant quatre mois dans notre structure d’insertion, puis les proposons à des entreprises sur la seule foi de notre parole, sans CV ni entretien d’embauche. Nous prenons en charge leur salaire pendant une semaine. Cela fonctionne le plus souvent, tant une personne qui a écopé de vingt ans de prison est décidée à rattraper le temps perdu. Sinon, nous continuons à la former et à l’accompagner.

Par ailleurs, nous avons convaincu Pôle emploi de convoquer des chômeurs non pas à de sempiternels entretiens, mais à des repas avec des patrons. L’enjeu n’est pas de décrocher un poste, mais de se découvrir, de faire tomber les barrières et d’apprendre l’un de l’autre. Certains se revoient ensuite, et des réseaux se tissent.

Un territoire d’invention

Int. : Parvenez-vous à mesurer les premiers résultats de votre action, notamment en matière d’emploi ? Tôt ou tard, il vous sera demandé des comptes à ce sujet.

J.-M. S. : Une partie des bénéfices produits par chacune de nos initiatives alimente notre fonds de solidarité internationale – à raison d’un centime par ticket de cinéma vendu, par exemple. Cela nous permettra d’effectuer un comptage très précis de nos actions.

Il est trop tôt pour juger de l’impact de nos programmes sur l’emploi. En revanche, le taux d’incivilités, suivi par la police, s’est considérablement amélioré. Autrefois le pire des Yvelines, il est tombé à la moyenne du département. Cela tient probablement en partie à notre action, mais aussi à la mise en place de caméras de vidéosurveillance et de détecteurs de plaques d’immatriculation à l’entrée de la ville. Désormais, les voitures volées qui entrent aux Mureaux sont immédiatement interceptées.

Int. : Qui sont les touristes que vous attirez ? Comment se passe leur rencontre avec les habitants ?

J.-M. S. : Nous ne touchons pas encore le grand public. Pour le moment, nous concentrons notre effort sur les dirigeants d’entreprise et les responsables des ressources humaines, que nous invitons à vivre une expérience. Peut-être partageront-ils un repas avec la famille d’un de leurs salariés, ou peut-être rencontreront-ils un jeune à la recherche d’un emploi. Dans tous les cas, des préjugés tomberont. Nous avons par exemple accueilli un dirigeant de Sodexo. Il a dîné avec plusieurs anciens détenus… et était enchanté. Il nous a recommandés au responsable de la RSE de Renault, lequel nous a recommandés au directeur de l’usine de Flins... Ce dernier n’avait jamais traversé Les Mureaux, bien que l’usine Renault soit toute proche. Il s’est aperçu au cours du repas qu’il avait laissé un ordinateur sur la banquette arrière de sa voiture. Nous avons caché notre panique, certains de devoir le raccompagner chez lui. À la fin de la soirée, sa voiture et son ordinateur l’attendaient.

Int. : En tant que territoire d’innovation, collaborez-vous avec des start-up pour élaborer des services inédits ?

J.-M. S. : Nous aidons des start-up à effectuer des tests auprès de populations ciblées. Nous avons un panel immense à leur offrir ! HEC nous met en contact avec des entrepreneurs de Station F qui cherchent des territoires d’expérimentation.

Par leur caractère innovant, ces expériences sont parfois aux marges des règles. Une ancienne bande qui écumait Les Mureaux il y a dix-huit ans, et dont les membres sont désormais sortis de prison, s’est constituée en association pour prévenir la dérive de la jeune génération. Elle est extrêmement inventive, mais n’agit pas toujours de façon très cadrée. La cantine qu’elle a montée prend quelque liberté avec les normes sanitaires. Elle incite les enfants à confectionner des gâteaux avec leur maman, pour les revendre dans son local. L’idée est excellente, mais l’Urssaf pourrait trouver à y redire. Comment accompagner ce type de structure et lui donner les moyens d’agir ? Ce fonctionnement en laboratoire mérite peut-être que l’on tolère quelques exceptions à la norme, pour trouver in fine le mode de régulation le plus pertinent.

Nous sommes également en relation avec La Banque postale, qui s’intéresse à des solutions adaptées aux clients ayant des parcours bancaires compliqués. Nous suivons par exemple un entrepreneur qui sort de prison et souhaite monter son affaire. Il a une dette de 37 000 euros. S’il ouvre un compte, son moindre revenu sera prélevé pour la rembourser. Nous proposons à La Banque postale de rencontrer des habitants se trouvant dans des situations de ce type, pour en saisir tous les ressorts.

La ruche plutôt que l’usine

Int. : Vous semblez vouloir déployer vos actions à grande échelle, ce qui soulève deux grands enjeux. Tout d’abord, vous devez faire basculer globalement et presque immédiatement toutes les parties prenantes dans la démarche : si l’une ne joue pas le jeu – si un patron qui dîne chez l’habitant se fait voler sa voiture, par exemple –, l’ensemble peu “capoter”. Ensuite, votre projet s’est constitué sur la force du rêve et de la foi que vous lui portiez. Lorsqu’il sera “industrialisé”, comment vous assurerez-vous que vos relais auront une même capacité de mobilisation ?

J.-M. S. : Nous restons une petite équipe, qui joue uniquement un rôle de catalyseur. Il n’était pas question que nous recréions l’équivalent d’une communauté d’agglomérations ou d’une mairie. Une de nos salariées est en charge d’un réseau de “complices” bénévoles que nous formons à accompagner des porteurs de projets. Là encore, il ne s’agit en aucun cas d’agir à leur place, mais de faire le point sur leurs avancées ou d’identifier d’éventuels blocages.

Pôle emploi se montre un relais extrêmement motivé de notre démarche. Sa directrice m’avait demandé de la présenter à son personnel. Un vendredi après-midi, sur un horaire non obligatoire, nous n’attendions pas foule. Pourtant, la totalité des 55 conseillers sont venus. Il faut mesurer combien leur tâche est éreintante dans une ville qui atteint 20 % de chômage. Leur accueil fut tiède, mais après une heure d’exposé, nous avions face à nous les conseillers de la première ville pilote du plein emploi en France, regorgeant d’idées et allant jusqu’à imaginer leur reconversion : nous tuions en quelque sorte leur mission… De leur propre aveu, nous avons réenchanté leur travail. Ils étaient même prêts à participer bénévolement à nos actions le week-end ! C’est ainsi que notre dynamique essaime.

Parmi les 250 idées collectées à ce jour, certaines sont faciles à mettre en œuvre, d’autres plus complexes. Il en arrive de nouvelles régulièrement. Des femmes des quartiers avaient, par exemple, appris des danses baroques pour un spectacle donné à Versailles. Après deux saisons, il vient de prendre fin. Toutefois, l’expérience était si belle qu’elles ont voulu la poursuivre. Elles ont créé une association, récupéré des costumes et monté leur propre spectacle, qu’elles ont donné à l’occasion de la fête de la musique. Versailles s’invitait aux Mureaux ! Nous imaginons maintenant un son et lumière qui recréerait le château sur les tours… Le décalage entre ces deux mondes crée une telle surprise qu’il permet de penser autrement.

De façon générale, le décalage est un aiguillon qui évite de tomber dans les lourdeurs institutionnelles et facilite la multiplication des projets. Lors de nos comités de pilotage, les membres de la préfecture ou de Pôle emploi sont invités à s’exprimer en leur nom propre. Lorsqu’ils le font pour leur structure, ils doivent revêtir un chapeau à clochettes… Autant dire que l’autorité qu’ils représentent est dédramatisée.

Int. : Les Mureaux ont une formidable richesse inexploitée, mais peut-être n’est-ce pas le cas de toutes les communes. À quelles conditions pensez-vous qu’un essaimage de votre action soit possible ?

J.-M. S. : Si vous en venez à considérer Les Mureaux comme une ville privilégiée et pleine d’attraits, j’ai atteint mon objectif ! Nous échangeons avec des communes qui s’intéressent à notre démarche. Nous leur conseillons de constituer un groupe d’une vingtaine de représentants de différentes communautés – citoyen non élu, responsable d’association, chef d’entreprise, dirigeant d’un grand groupe, représentants de la mosquée et de l’église, élu municipal… – et de venir vivre une expérience de trois jours aux Mureaux. À leur retour, ils ne sont plus les mêmes. Il n’y a aucune raison que notre détermination ne soit pas contagieuse !

Le compte rendu de cette séance a été rédigé par :

Sophie JACOLIN